Pollution en Allemagne: prison possible mais strictement encadrée

La justice européenne n'a pas écarté jeudi la possibilité de peine de prison à l'égard de responsables politiques bavarois qui n'ont pas remédié à la pollution de l'air, tout en soulignant que cela nécessitait une loi précise et le respect du principe de proportionnalité.

In fine, la justice allemande devra déterminer si ces conditions sont remplies pour décider des peines encourues, estime la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE).

L'institution, basée à Luxembourg, s'est prononcée sur un cas emblématique en Allemagne: l'opportunité de condamner à de la prison des responsables publics en Bavière afin de les contraindre à respecter une décision de justice qui les enjoint à prévoir des interdictions de circulation pour les véhicules à moteurs diesel à Munich.

Le prononcé d'une telle peine ne peut intervenir "que s'il existe à cette fin une base légale nationale accessible, précise et prévisible, et si cette contrainte est proportionnée", explique la Cour dans un communiqué de presse.

Dans ses conclusions, l'avocat général de la CJUE avait argumenté qu'une telle législation ne semblait pas exister en Allemagne à l'égard de responsables publics.

La CJUE a été sollicitée par le tribunal administratif de Bavière (sud-est de l'Allemagne) qui s'interrogeait sur l'opportunité d'infliger des peines d'emprisonnement pour s'assurer de l'application d'une décision de justice.

Dans ce cas en effet, l'imposition d'astreintes financières n'est pas coercitive, car le paiement des amendes revient de facto dans les caisses du Land de Bavière, et n'entraîne donc pas de perte pour l'administration.

L'affaire remonte à une plainte déposée en 2012 par une ONG environnementale allemande, Deutsche Umwelthilfe (DUH), bête noire de l'industrie automobile. Le Land de Bavière a été condamné trois fois dans cette affaire, notamment en 2017 au paiement d'une astreinte de 4.000 euros, qu'il a acquittée.

Mais devant le refus constant du Land de se conformer aux injonctions, Deutsche Umwelthilfe a introduit un nouveau recours demandant non seulement une nouvelle astreinte, mais aussi l'emprisonnement de la ministre régionale de l'Environnement, voire du ministre-président.

Pour la Cour il incombe au tribunal bavarois de se prononcer sur "la contrainte par corps", mais pour cela "il doit exister, en droit interne, une base légale suffisamment accessible, précise et prévisible".

Par ailleurs, souligne l'arrêt, une peine d'emprisonnement ne peut être prononcée "que lorsqu'il n'existe aucune mesure moins contraignante", comme par exemple des astreintes d'un montant élevé, répétées, dont le paiement ne se ferait pas au profit du budget du Land.

© 2019AFP