Pourquoi le secteur automobile cale

Ventes qui s'essoufflent, abaissements successifs de prévisions annuelles: le secteur automobile bute contre l'entrée en vigueur de nouvelles normes d'homologation, alors qu'il s'apprête à entrer dans une nouvelle phase marquée par un contexte international moins favorable.

Après des années de croissance ininterrompue sur les trois principaux marchés mondiaux (Chine, Amérique du Nord et Europe), l'industrie automobile marque le pas.

Si les constructeurs français PSA et Renault sont parvenus à confirmer leurs objectifs annuels, les équipementiers Valeo et Plastic Omnium viennent d'abaisser les leurs.

La réaction du marché ne s'est pas faite attendre: Valeo a plongé de 21,02% à 23,59 euros à la Bourse de Paris vendredi, tandis que Plastic Omnium avait glissé la veille de 4,44% à 23,70 euros.

Il en avait été de même pour leur homologue allemand Continental qui a chuté de plus de 13% en une seule séance, en août, après avoir abaissé ses prévisions annuelles.

Par ricochet, les équipementiers sont notamment affectés par de nouvelles normes d'émissions polluantes. L'entrée en vigueur début septembre d'une nouvelle procédure d'homologation des véhicules plus exigeante (WLTP) a entraîné des retards de production en Europe, en particulier en Allemagne.

 

Nouvelles normes

Le "WLTP aura un impact important sur les résultats des constructeurs allemands aux troisième et quatrième trimestres", en particulier chez Volkswagen, a ainsi estimé auprès de l'AFP Ferdinand Dudenhöffer, expert du Center Automotive Research (CAR) de Duisbourg.

Empêtré dans le scandale des moteurs diesel truqué, Volkswagen, qui publiera ses chiffres trimestriels mardi, a dû effectuer des mises à jour de logiciel sur des véhicules, qui ont fait "que "les autres sujets ont été repoussés".

De même, Daimler a dévoilé un bénéfice net en recul de 21% pour le troisième trimestre, son activité ayant été affectée par des "procédures administratives et autres mesures" concernant des voitures diesel et par les nouveaux critères de tests antipollution.

"Il y a beaucoup plus de modèles différents en Allemagne donc les organismes qui mesurent les émissions ont été un peu engorgés par l'afflux de véhicules à tester", a notamment indiqué Gaëtan Toulemonde, expert automobile chez Deutsche Bank.

De son côté, BMW doit publier ses résultats trimestriels le 7 novembre, alors que le groupe a révisé à la baisse ses objectifs annuels.

Le constructeur de voitures haut de gamme n'a pas accusé de retard de certification, mais a souffert d'une concurrence accrue en raison de la mise sur le marché à des prix très compétitifs de véhicules qui n'auraient pas pu être commercialisés à partir de septembre.

"Il y a eu un impact très fort à l'instant T, au moment du passage aux nouvelles normes mais cet impact va être lissé sur les prochains mois", a commenté Flavien Neuvy, directeur de l'Observatoire Cetelem de l'Automobile.

En revanche, d'autres facteurs pourraient affecter l'industrie automobile de façon plus durable.

 

Fin d'un cycle

Après avoir connu une série de belles années, les acteurs de l'automobile vont devoir faire face à un ralentissement de la croissance du marché mondial, qui avait été tirée par la Chine.

"La Chine montre des signes de faiblesse, elle ne sera plus le moteur de croissance qu'elle a pu être", a souligné M. Neuvy.

Plusieurs groupes ont déjà fait état d'une détérioration de leurs ventes sur ce marché, le premier au niveau mondial.

En outre, le deuxième marché, celui des États-Unis, est "mature", selon l'expert, et ne sera donc pas à même de générer de la croissance pour l'industrie.

Côté européen, le problème est similaire. "En Europe de l'Ouest, le marché est saturé", a indiqué M. Dudenhöffer. Le marché allemand "devrait reculer l'an prochain", les chiffres français "sont sur un plateau", tandis que l'Espagne "a encore peu de potentiel", a-t-il détaillé.

Toutefois, "il ne faut pas tomber dans le catastrophisme", a nuancé M. Neuvy.

"L'industrie entre dans une nouvelle phase plus incertaine mais les ventes restent à des niveaux très élevés", a-t-il complété.

Outre ces défis commerciaux, les constructeurs devront aborder de nouvelles difficultés, notamment technologiques et environnementales (voitures électriques, nouvelles mobilités...), à l'heure où les consommateurs deviennent de plus en plus exigeants sur cette question.

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