Mondial 2018 : le Brexit inquiète (+vidéo)

Les responsables de l'industrie automobile rassemblés mardi au Mondial de l'Auto à Paris ne manquent pas de sujets d'inquiétudes pour l'avenir, mais la possibilité d'un Brexit sans accord avec l'Union européenne s'impose comme leur angoisse numéro un.

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Lorsqu'il a énuméré les risques pour le marché automobile mondial, Harald Krüger, le patron de BMW, a d'abord cité l'éventualité d'une sortie du Royaume-Uni de l'UE sans accord, à six mois de l'échéance.

Le Brexit "laisse déjà des traces", a-t-il expliqué lors d'une table ronde avec des journalistes. Au Royaume-Uni, "le marché recule, nous vendons moins de voitures".

Or, le pays représente le premier marché d'exportation en volume pour le groupe, comme il l'est pour l'ensemble de la puissante filière automobile allemande, un argument d'ailleurs souvent repris par les partisans britanniques du Brexit pour imposer des négociations dures avec l'UE.

"Nous nous préparons à une situation difficile" en cas d'absence d'accord politique d'ici avril 2019, a prévenu M. Krüger.

Le constructeur bavarois, qui emploie environ 8.000 personnes dans le pays, a déjà avancé à fin mars la pause estivale pour son usine fabriquant la Mini au Royaume-Uni, afin qu'elle corresponde au moment de la sortie effective de l'UE dans le but d'éviter des perturbations en cas d'absence d'accord à la date butoir.

"Toutes les entreprises se préparent au pire et espèrent le meilleur. Le pire serait un Brexit dur, mais en fin de compte, on espère que la raison prévaudra", a commenté mardi Carlos Ghosn, patron de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, également implantée au Royaume-Uni.

"La visibilité est ce qui est le plus important pour les constructeurs", a-t-il souligné. "Un manque de visibilité veut dire que vous arrêtez vos investissements. Aujourd'hui nous sommes dans une situation de gel".

Les investissements du secteur automobile britannique se sont déjà repliés de 50% au premier semestre.

M. Ghosn a lancé une forme d'avertissement aux partisans d'un Brexit dur: "je ne pense pas que quelque constructeur que ce soit ne soit pas prêt pour le pire. Ca ne nous plaît pas, mais nous sommes prêts".

Parmi les risques politiques internationaux pour l'automobile, "le premier, c'est le Brexit", a commenté auprès de l'AFP, Maxime Lemerle, expert du secteur pour Euler Hermes.

 

Repli des ventes

"Le Royaume-Uni est à la fois un marché important et un centre de production important. Sur ce marché, 80% des véhicules sont importés, et aux deux tiers de l'Union européenne", explique-t-il. En sens inverse, "80% de la production britannique est exportée", essentiellement vers l'Europe.

Changer la répartition des chaînes d'approvisionnement et des usines représenterait un coût énorme pour les constructeurs internationaux, tout comme la perte de volumes de ventes en cas de barrières douanières.

Au Royaume-Uni, "nous attendons un repli des ventes de 6% en 2018, puis de 3% l'an prochain, dans le scénario d'un accord qui se ferait à la dernière minute mais qui se ferait", met en garde M. Lemerle, prévenant que ce serait incomparablement pire en cas de sortie désordonnée.

"Si on n'avait pas de +deal+, on discuterait d'abord avec nos partenaires sociaux sur ce qu'il conviendrait de faire", a affirmé Carlos Tavares, patron de PSA (Peugeot, Citroën, DS, Opel/Vauxhall), laissant entendre qu'il y aurait des conséquences pour l'emploi. Ma responsabilité "sera de protéger mon entreprise et je prendrai toute décision utile pour cela, de la manière la plus humaniste possible".

"Il est évident pour notre industrie que nous devons tout faire pour maintenir une libre circulation des biens et services, tout le monde à intérêt à préserver de bonnes relations" entre le Royaume-Uni et l'UE, a estimé mardi Dieter Zetsche, le patron de Daimler (Mercedes, Smart).

Les 27 pays de l'UE et Londres doivent s'entendre en octobre ou novembre sur l'accord scellant leur divorce ainsi que sur une déclaration fixant le cadre de leur future relation.

Mais la Première ministre britannique Theresa May a estimé que les négociations sur le Brexit étaient dans une "impasse" après le rejet de ses propositions par les dirigeants européens au sommet informel de Salzbourg (Autriche) en septembre.

© 2018AFP