Les ex-Goodyear assignent la maison mère et Titan

Les salariés licenciés de Goodyear à Amiens-nord ont assigné mercredi les multinationales Goodyear et Titan devant le tribunal de la ville, pour obtenir des dommages et intérêts en raison de leur refus de reprise de ce site par une coopérative du personnel.

L'avocat des Goodyear, Me Fiodor Rilov, a adressé le même jour à la presse une copie de l'assignation qu'il envoie aux deux sociétés-mères de ces groupes basés aux Etats-Unis et dans laquelle figurent, a-t-il précisé à l'AFP, les noms des deux cents premiers ex-salariés du fabricant de pneumatiques engagés dans cette procédure.

Cette initiative survient le jour même où le ministre de l'Economie Emmanuel Macron visite dans la capitale picarde l'usine Procter and Gamble, implantée à 200 m environ du site de l'usine fermée en 2014, avec 1.143 licenciements à la clé.

"Il y a la volonté de faire coïncider" l'annonce de l'action en justice avec ce déplacement, a déclaré à l'AFP Me Rylov. Parallèlement, les Goodyear ont décliné une invitation lancée par le ministre à le rencontrer lors de sa venue, "compte tenu de l'énergie avec laquelle vous avez soutenu la fermeture de notre usine par Goodyear", a répondu Mickael Wamen, de la CGT Goodyear.

Le ministre a répliqué lors de sa visite en estimant "qu'on ne rend service à personne si on ressasse cette histoire en permanence". Visant sans la nommer la CGT Goodyear, il a jugé qu'il y avait eu "une responsabilité de celles et ceux qui ont été les pyromanes dans cette affaire, c'est-à-dire en démontrant à des investisseurs étrangers que le climat social était mauvais" ce qui les a "empêché de réinvestir".

L'assignation adressée à Goodyear et Titan - concurrent considéré comme complice - vise à mettre en cause, devant le tribunal de grande instance d'Amiens, "la responsabilité délictuelle" des deux géants industriels.

Selon ce document, en repoussant le projet de Scop pour continuer la production de pneus agraires, les multinationales américaines ont violé l'"engagement de ne pas faire obstacle à l'arrivée d'un repreneur de l'usine d'Amiens-nord", consigné dans l'accord de fin de conflit de janvier 2014.

Elles sont aussi accusées d'avoir "empêché l'exécution de l'obligation de fournir du travail" aux ouvriers, et ce depuis début 2009, en raison des "transferts de production successifs" vers d'autres usines Goodyear.

Fin 2011, Titan s'était dit intéressé par une reprise partielle d'Amiens-nord mais n'avait pas donné suite. Il a signé en novembre dernier avec le fabricant de pneumatiques un contrat lui confiant notamment la fabrication sous licence des pneus Goodyear hors de l'Europe. Pour Me Rilov, il s'agit là d'"un tour de passe-passe" qui "reste en travers de la gorge des Goodyear".

Selon leur avocat, bien d'autres ex-Goodyear vont venir grossir ces prochaines semaines les rangs des 200 nommés dans l'assignation à comparaître.

Ceux-ci réclament "80.000 euros en moyenne par salarié" de dédommagement.

Le 12 janvier dernier, huit ex-employés à Amiens-nord ont été condamnés à 24 mois de prison, dont 9 fermes, pour séquestration de deux cadres de l'entreprise. Le procès en appel aura lieu le 19 octobre.

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