La famille de Carlos Ghosn saisit les Nations Unies

La famille de Carlos Ghosn, emprisonné depuis plus de trois mois au Japon, a décidé de saisir les Nations unies, estimant que les "droits fondamentaux" de l'ancien dirigeant de Renault et Nissan n'étaient pas respectés, a annoncé lundi son avocat qui espère une prochaine libération sous caution.

"Nous avons pris la décision de saisir les instances de l'ONU chargées de veiller au respect des droits fondamentaux pour tous", a annoncé la famille de l'ex-PDG de Renault, dans un communiqué lu par Me François Zimeray à Paris. "C'est bien l'empêchement à préparer sa défense pour un procès équitable qui nous inquiète".

"Voilà plus de 100 jours que Carlos Ghosn est emprisonné au Japon dans la citadelle de Kosuge, un lieu de détention aux règles moyenâgeuses", "dans une cellule étroite, la lumière allumée de jour comme de nuit, obligé de dormir sur le dos, le visage découvert", ont dénoncé les proches de l'homme d'affaires dans ce communiqué dévoilé lundi par Me Zimeray, avocat au barreau de Paris, lors d'une conférence de presse.

L'ancien ambassadeur de France chargé des Droits de l'homme a précisé que cette saisine s'effectuait auprès du groupe de travail sur la détention arbitraire (WGAD) de l'organisation internationale. Selon lui, le délai pour ce genre de saisine est d'environ 6 mois.

L'avocat et son associée Jessica Finelle sont les représentants de la femme de Carlos Ghosn, Carole, qui avait dénoncé dans une interview récente à Paris Match les conditions de détention de son mari, les qualifiant de "déplorables, voire inhumaines", et des enfants du patron emprisonné, Caroline, Maya, Nadine et Anthony.

"Cette initiative fait écho à de très nombreuses voix comme la branche japonaise de la FIDH (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme, NDLR), pour dénoncer ce système appelé justice de l'otage, +hostage justice+, et qui trouvent (...) dans l'incarcération de Carlos Ghosn l'opportunité de faire la lumière sur le combat qu'ils mènent depuis très longtemps pour que le Japon se conforme aux standards internationaux en matière de procès equitable et de détention", a détaillé François Zimeray, qui a martelé qu'il ne s'agissait "en aucun cas d'une initative prise contre le Japon".

 

Son nouvel avocat optimiste quant à une libération sous caution

Le nouvel avocat principal de Carlos Ghosn s'est dit lundi plus optimiste que son prédécesseur sur la possibilité d'une libération sous caution de son client, grâce à une stratégie "totalement différente". Maître Junichiro Hironaka, surnommé "l'innocenteur" pour avoir obtenu nombre d'acquittements d'inculpés de haute volée, a déposé jeudi dernier une demande de libération sous caution de M. Ghosn, qu'il a qualifiée de "convaincante".

Il s'agit de la troisième après l'échec des deux premières requêtes d'un précédent avocat, Motonari Otsuru.

"Il ne serait pas étrange" que la mise en liberté de M. Ghosn soit acceptée, a dit M. Hironaka à la presse, tout en indiquant qu'il lui semblait "inexact de dire que M. Ghosn ne serait pas libéré tant qu'il n'aurait pas avoué".

Le tribunal de Tokyo n'a toujours pas tranché sur cette demande, mais la décision devrait "tomber sous peu", selon M. Hironaka, qui, en cas de refus, "fera appel".

Dans sa nouvelle requête, M. Hironaka, qui a désormais accès à une partie des pièces à conviction, propose que M. Ghosn soit surveillé par des caméras avec des moyens limités de communiquer avec l'extérieur.

Interrogé sur le fond de l'affaire, il insiste sur le fait qu'il trouve "curieux" que "seuls M. Ghosn et son ex-bras droit Greg Kelly soient inculpés alors que les faits reprochés remontent à une dizaine d'années et ont dû être connus d'autres dirigeants de Nissan".

M. Hironaka s'interroge aussi sur l'utilisation opportuniste par Nissan d'une nouvelle loi sur la négociation de peine, alors que les faits sont anciens.

"Je veux avancer avec une toute nouvelle façon d'aborder le dossier", a-t-il dit, sans livrer de détails sur sa stratégie.

M. Ghosn est inculpé pour avoir minoré ses revenus déclarés aux autorités boursières dans des documents remis par Nissan pour les années 2010 à 2018.

L'ancien patron franco-libano-brésilien est en outre inculpé pour abus de confiance, sur des soupçons d'avoir tenté de faire porter à Nissan le fardeau de pertes financières personnelles et d'avoir rétribué, via une filiale du constructeur d'automobiles, un ami saoudien qui s'était porté garant pour le sortir de cette mauvaise passe.

 

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