La chine panique les Bourses européennes

Les places financières européennes ont très lourdement chuté lundi après avoir vu la Bourse de Shangai terminer sur un plongeon de presque 8,5 %.

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Les marchés financiers ont connu lundi une journée noire rappelant les pires heures de la crise de 2008, dans le sillage des places boursières asiatiques, les inquiétudes grandissant face aux possibles effets du ralentissement chinois sur la croissance mondiale. "La journée a été traversée par des mouvements massifs sur l'ensemble des marchés : la baisse des actions et des matières premières, la hausse de l'euro face au dollar et tout cela dans de larges proportions", résume Erik F. Nielsen, chef économiste d'Unicredit.

La déroute en Asie, avec un lundi noir à Shanghaï, s'est propagée à l'Europe puis à Wall Street qui a ouvert nettement dans le rouge avant de se reprendre légèrement. Après avoir cédé à la panique dans l'après-midi, perdant plus de 8 % en séance, la Bourse de Paris a fini en baisse de 5,35 %. Francfort a chuté de 4,70 %, tandis que Londres a dégringolé de 4,67 %, Madrid de 5,01 % et Milan de 5,96 %. L'Eurostoxx 50 s'est pour sa part inscrit en repli de 5,35 %. Le constructeur automobile italo-américain Fiat Chrysler affichait à la clôture de la Bourse de Milan une perte de 7,30% à 12,07 euros, après avoir reculé de 10% durant la séance.

La Chine dominait toujours les préoccupations des investisseurs, alors que s'enchaînent les indicateurs décevants attestant de l'essoufflement de la deuxième économie mondiale, à la fois usine du monde et marché très convoité. "Je pense que le problème est la croissance de l'économie chinoise", a déclaré le ministre britannique des Finances George Osborne, interrogé lors d'une conférence de presse à Stockholm sur la chute des marchés financiers chinois. "Bien sûr, il y a de la volatilité au jour le jour sur les marchés actions. Mais le premier sujet (la croissance) est le principal problème", a-t-il souligné. La croissance chinoise était de 7,4 % l'an dernier, à son plus bas niveau depuis 1990, et a encore reculé à 7 % pour les deux premiers trimestres de 2015.

La dévaluation surprise du yuan le 11 août - perçue comme un effort désespéré des autorités chinoises pour relancer ses exportations et l'activité économique - n'a fait qu'aviver l'inquiétude générale, provoquant une onde de choc sur les marchés financiers. Or, au lendemain de la crise financière de 2008, avec des économies américaine et européenne affaiblies, le monde attendait de la Chine qu'elle tire vers le haut la croissance planétaire. Le pays est un important marché pour les biens manufacturés et tout ralentissement de la demande se ferait vivement ressentir au-delà de ses frontières. Mais rien ne semblait apaiser le regain d'inquiétude des investisseurs sur la conjoncture mondiale dans son ensemble, à l'orée d'une semaine riche en publications de statistiques aux États-Unis et en Europe. "L'aversion au risque a largement pris le dessus", relèvent les analystes de Saxo Banque.

À Shanghaï, l'indice composite a clôturé en baisse de 8,49 %, sa plus forte baisse journalière depuis février 2007, effaçant tous les gains enregistrés depuis le début de l'année. À Tokyo, l'indice Nikkei a terminé la journée en baisse de 4,61 %, à un plus bas de six mois. Hong Kong a reculé de 5,17 %, et Sydney de 4,09 %, un plus bas en deux ans. "Les réactions des marchés asiatiques reflètent la conviction des investisseurs qu'un atterrissage brutal (de l'économie chinoise) est inévitable", selon Evan Lucas, du courtier IG Markets. Un indicateur manufacturier de référence publié vendredi en Chine avait alimenté la fébrilité des marchés mondiaux : il s'est établi à son plus bas niveau depuis plus de six ans, signalant une violente contraction de l'activité manufacturière chinoise en août.

"L'effondrement des indices chinois du jour est cependant à mettre sur le compte des fortes attentes des investisseurs qui anticipaient une (nouvelle forte) intervention de la banque centrale chinoise (PBOC)", fait remarquer John Plassard, de Mirabaud Securities, qui évoquait plus tôt en cours de séance un "vent de panique". Pékin a, certes, annoncé dimanche que le gigantesque fonds de pension chinois allait être autorisé à investir une partie de ses colossaux actifs dans les Bourses locales. Mais l'annonce n'a pas rassuré les investisseurs chinois (pour la plupart des particuliers et petits porteurs), d'autant que persistent les craintes de "bulle" - de survalorisation des marchés locaux déconnectés de l'économie réelle. Pour enrayer la spectaculaire débâcle des Bourses chinoises, Pékin est fortement intervenu depuis fin juin, des organismes publics réalisant des achats massifs d'actions. Mais, en dépit des assurances du gouvernement, les investisseurs chinois redoutent désormais un retrait prématuré de ces mesures de soutien.

Les matières premières n'étaient pas épargnées : les cours du brut se repliaient, évoluant sous les 40 dollars le baril à des niveaux inédits depuis six ans. Sur le marché des changes, l'euro grimpait à 1,1562 dollar vers 18 h 45 (16 h 45 GMT), face au flou entourant le resserrement de la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed). Le marché obligataire a pour sa part vu les taux européens remonter légèrement à la clôture, affecté à la marge par l'inquiétude généralisée.

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