Brexit: le projet d'accord soulage l'industrie

Les milieux d'affaires britanniques ont poussé un énorme soupir de soulagement mercredi soir après la validation par Londres d'un projet d'accord avec Bruxelles sur le Brexit, qui leur évite le coût et les complications incalculables d'une sortie brutale de l'UE.

L'aval du cabinet "éloigne d'un pas le précipice cauchemardesque d'un non accord", a salué Carolyn Fairbairn, la directrice générale de la principale organisation patronale, la CBI. "Cet accord est un compromis, y compris pour les entreprises, mais il offre une période de transition essentielle qui éloigne la sortie brutale", souligne-t-elle dans un communiqué.

Le projet d'accord conclu entre le gouvernement de Theresa May et la Commission européenne garantit notamment le maintien du pays dans l'union douanière et la transition qu'espéraient vivement les milieux d'affaires, symbole d'un Brexit en douceur.

En vertu de ce précieux sas, les entreprises britanniques resteront soumises aux mêmes règles qu'actuellement jusqu'à la fin de l'année 2020, le temps que la physionomie de la relation future entre le Royaume-Uni et l'UE soit négociée.

A défaut de cette période tampon, les sociétés seraient, de l'aveu de Mme Fairbairn, tombées "dans le précipice" d'un Brexit brutal avec l'adoption des règles de base de l'Organisation mondiale du commerce, qui fixent des droits de douane pour la circulation des marchandises.

Et les conséquences d'un Brexit "dur" auraient pu être dramatiques pour l'économie. Dans un rapport jeudi, le Fonds monétaire international (FMI) estime que dans ce cas le produit intérieur brut pourrait être jusqu'à 7,8% inférieur à ce qu'il aurait été sans le Brexit.

Le secteur industriel redoutait particulièrement ce divorce sans concession.

Certains groupes, notamment dans la pharmacie et l'alimentaire, ont même constitué des stocks par précaution. Le secteur automobile a lui averti contre le risque d'une flambée des coûts des voitures assemblées au Royaume-Uni.

 

Dégâts limités pour la City

Plusieurs constructeurs avaient prévenu de conséquences néfastes à très court terme en l'absence d'accord sur le Brexit: le japonais Toyota et l'allemand BMW avaient évoqué un arrêt temporaire de leur production au Royaume-Uni, et Jaguar Land Rover une réduction de ses investissements.

Quelques entreprises du secteur ont d'ailleurs déjà joint le geste à la parole, comme l'équipementier allemand Schaeffler qui a annoncé la semaine dernière la fermeture de deux usines au Royaume-Uni, menaçant 500 postes.

Au-delà de l'automobile, plusieurs autres géants industriels avaient menacé de réduire leurs investissements au Royaume-Uni, notamment l'avionneur européen Airbus et le conglomérat allemand Siemens.

Avec la perspective d'un départ ordonné, ces géants gagnent un peu de temps pour s'organiser, même si leur fonctionnement entre plusieurs pays européens et le sol britannique pourrait s'avérer plus complexe.

Le puissant secteur financier a aussi salué le projet d'accord : la Corporation de la City de Londres qui représente les intérêts de la place londonienne, y a vu un "pas en avant significatif vers un accord final". "Il est vital qu'une période de transition soit garantie pour donner le temps au secteur de faire face à ce processus complexe, et l'accord le permet", s'est-elle félicitée.

Les dégâts du Brexit sur la place financière londonienne pourraient in fine être assez limités, alors que certains défenseurs du maintien dans l'UE avaient pronostiqué un exode de banquiers vers le continent.

Quelques grandes banques internationales - comme HSBC, Goldman Sachs ou UBS - ont certes annoncé leur intention de déplacer des centaines d'emplois sur le continent, que ce soit à Francfort, Paris ou ailleurs. Mais l'ampleur de ces mouvements est restée assez faible: un haut responsable de la City de Londres a récemment confié à l'AFP prévoir le départ de "quelques milliers d'emplois tout au plus", alors que le secteur emploie 800.000 professionnels dans la capitale.

Le projet d'accord fournit aussi une respiration aux employeurs du secteur des services au sens large. L'hôtellerie-restauration, entre autres, s'inquiétait d'un divorce acrimonieux qui aurait pu le priver à brève échéance d'une main d'oeuvre immigrée bon marché d'Europe de l'Est et du Sud.

Les conséquences du Brexit sont toutefois déjà tangibles puisque le nombre de ressortissants de l'UE travaillant au Royaume-Uni a connu au troisième trimestre son pire recul depuis le début de la compilation des données en 1997.

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