80 km/h: Edouard Philippe dit non aux sénateurs

Édouard Philippe "a écarté" la proposition de sénateurs qui voulaient cantonner à certaines routes secondaires l'abaissement de la vitesse à 80 km/h et décentraliser la décision, a annoncé jeudi Matignon.

Le Premier ministre a reçu jeudi la sénatrice (UC) Michèle Vullien et les sénateurs Michel Raison (LR) et Jean-Luc Fichet (PS), porteurs des conclusions du groupe de travail institué fin janvier. Ce rapport conteste "la pertinence de l'abaissement de la vitesse moyenne autorisée à 80 km/h sur le réseau bidirectionnel sans séparateur central", souligne Matignon dans un communiqué, et les sénateurs "proposent de revoir la méthode, au bénéfice d'une réduction de la vitesse décentralisée et ciblée".

"S'appuyant notamment sur une étude publiée le 17 avril dernier par l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière, fondée sur l'analyse de l'accidentalité dans chaque département, le Premier ministre a écarté cette proposition", ajoute Matignon.

Selon Matignon, les routes réputées sûres mais très fréquentées "concentrent en réalité près de deux tiers des accidents mortels constatés sur le réseau bidirectionnel".

"Les départements des trois sénateurs n'échappent pas à cette règle tragique", insiste encore le communiqué du Premier ministre, qui réitère que l'abaissement à 80 km/h "s'appliquera bien le 1er juillet 2018", avec une clause de revoyure au 1er juillet 2020.

"Le Premier ministre ne méconnaît pas les réactions suscitées par cette mesure mais rappelle qu'il s'agit de préserver des vies humaines et d'éviter de nombreux drames", conclut Matignon.

"Au lieu de saisir cette main tendue du Sénat, Édouard Philippe a campé sur ses positions et rejeté cette nouvelle approche, manifestement soucieux de ne pas donner le sentiment de reculer sous la pression", a regretté M. Raison dans un communiqué.

"Les sénateurs assumeront leurs responsabilités afin de favoriser les politiques de prévention (...) par la présentation d'une proposition de loi et des amendements au projet de loi de finances 2019 afin de s'assurer que les recettes des amendes radars soient utilisées pour améliorer le réseau routier et sa sécurité, et non pour financer le désendettement de l'État", a-t-il ajouté.

M. Philippe doit affronter depuis plusieurs mois la contestation de certains élus locaux face à cette mesure qu'il porte en personne et sur laquelle il se montre inflexible.

Cette décision, qui concerne 400.000 km de routes et pourrait sauver quelque 400 vies par an selon le Premier ministre, ne semble pas faire l'unanimité au sein même du gouvernement : mi-mai lors d'une réunion publique, le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb a préféré prendre un "joker" plutôt que de s'exprimer sur le sujet.

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