"Oui, la fiscalité sur le diesel va s'accroître. (...) Mais nous assumons ce choix, qui est un choix de transition écologique", a défendu mercredi Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie et des Finances.
Pour poursuivre l'alignement de la fiscalité du gazole sur celle de l'essence, entamée en 2015, le projet de budget dévoilé mercredi prévoit une hausse de 2,6 centimes par litre de gazole l'an prochain.
A cela s'ajoutera l'impact de la hausse de la contribution climat-énergie (CEE), sorte de taxe carbone, relevée à 44,6 euros par tonne de carbone l'an prochain.
Au total, ces deux mesures fiscales vont entraîner une augmentation globale de 7,6 centimes le litre sur le gazole, soit une hausse de 10% des taxes qui représentent elles-mêmes autour de 70% du prix payé à la pompe par les automobilistes.
Selon l'estimation de Bercy, ces hausses de taxes devraient rapporter 3,7 milliards d'euros à l'Etat l'an prochain. C'est finalement bien plus que les 2 milliards d'euros annoncés mi-juillet par Bruno Le Maire.
"On ne peut pas dire d'un côté qu'il faut passer à d'autres modes de transport, que le diesel pose des problèmes importants, qu'il faut donc transformer notre industrie des transports, les motorisations et les habitudes des consommateurs, et garder la même fiscalité sur le diesel, ça n'a pas de sens", a argumenté le ministre de l'Economie.
Pour l'association d'usagers Automobile Club Association (ACA), montée au créneau dès lundi, la pilule a du mal à passer.
Evoquant un "délire fiscal", son porte-parole Yves Carra dénonçait à l'AFP un rattrapage "par le haut" entre le diesel et l'essence, alors que le gouvernement aurait pu choisir de baisser les taxes sur l'essence.
Comme le rééquilibrage entre essence et diesel va se poursuivre et la CCE encore monter en puissance dans les prochaines années, "on va arriver sur le gazole à 31 centimes d'augmentation (des taxes) à la fin du quinquennat et sur l'essence à 15 centimes", calcule Francis Duseux, le président de l'Union française des industries pétrolières (Ufip). Le gazole représente encore 80% du volume de carburants vendus en France.
"On risque d'arriver à des limites inacceptables pour les Français", prévient-il, surtout lorsque le prix du pétrole, très bas depuis trois ans, va remonter.
Mais le gouvernement défend une mesure censée aussi contribuer à "financer le retour à l'équilibre des finances publiques".
En comparaison, les taxes sur le tabac augmenteront aussi, mais dans une moindre mesure, de 0,5 milliard d'euros.
Compensations
Conscient de l'impact sur le pouvoir d'achat des automobilistes, le gouvernement promet des compensations.
"Dans un souci d'équité, des dispositifs d'accompagnement ciblés permettront d'éviter que la fiscalité écologique ne pèse sur le pouvoir d'achat des ménages les plus modestes", assure-t-il dans son projet de budget.
Pour les automobilistes, cela se concrétisera essentiellement par un renforcement des primes à la conversion de véhicules anciens, notamment les diesel, qui seront accessibles même pour l'achat de véhicules d'occasion, ou encore le bonus-malus à l'achat de nouveaux véhicules.
La prime à la conversion de 1.000 euros sera doublée pour les ménages non imposables.
Comparé aux 3,7 milliards d'euros de recettes supplémentaires escomptées sur les carburants, le gouvernement a prévu pour ces dispositifs d'accompagnement 388 millions d'euros en 2018, contre 347 millions en 2017, et espère convertir 100.000 véhicules par an, contre 19.000 ces deux dernières années avec les mécanismes précédents.
"Ces aides restent assez faibles, tous les Français n'auront toujours pas le pouvoir d'achat" pour changer de véhicule, pointe cependant le président de l'Ufip.