Nissan: l'irruption d'un actionnaire activiste enfièvre le marché

La montée d'un fonds d'investissement singapourien "activiste" au capital de Nissan, au moment où le groupe japonais traverse de graves difficultés, a fait s'envoler le titre du constructeur de 20% à la Bourse de Tokyo.

L'action de Nissan a flambé de presque 21% en cours d'échanges mardi à la Bourse de Tokyo, avant de finir la séance en hausse de 12,8%. Il a ensuite repris son souffle mercredi, mais sans guère entamer ses gains de la veille --clôturant en léger repli de 0,43% à 414 yens.

A l'origine de cette euphorie du marché: un document transmis lundi par Nissan aux régulateurs, avec des informations mises à jour sur son actionnariat.

On y découvrait notamment que le fonds Effissimo Capital Management, basé à Singapour, possédait désormais quelque 2,5% du capital du constructeur nippon (avec 97.815 actions) --via son intermédiaire Suntera. C'est certes six fois moins que ce que contrôle Renault, le partenaire français historique de Nissan.

Mais Effissimo n'est pas inconnu sur le marché boursier: il s'était déjà distingué comme un investisseur activiste --c'est-à-dire s'efforçant de faire pression sur les dirigeants d'une entreprise pour qu'ils agissent dans l'intérêt des actionnaires--, en particulier en montant au capital du conglomérat japonais Toshiba.

Cette irruption intervient au moment où Nissan subit de plein fouet le refroidissement du marché automobile mondial: le constructeur a annoncé la semaine dernière qu'il allait supprimer 9.000 postes dans ses effectifs mondiaux et tailler de 20% dans ses capacités de production pour s'adapter à une nette dégradation de ses ventes.

Effissimo peut certes espérer engranger quelques bénéfices à moyen terme sur le titre, étant donné que ce dernier évolue à un cours très bon marché après avoir chuté sans discontinuer depuis fin 2023.

Mais de l'avis des analystes, alors que l'entreprise vient de dévoiler un plan massif de réduction d'effectifs, de contrôle des dépenses et de baisse des capacités, difficile d'imaginer dans l'immédiat des efforts supplémentaires significatifs --même si Effissimo pourra le pousser à diminuer encore davantage ses parts dans ses partenaires Mitsubishi Motors ou Renault.

Le constructeur, distancé dans les véhicules hybrides et faute de renouvellement de ses modèles jugés vieillissants, a vu sur le dernier trimestre (juillet-septembre) ses ventes s'effriter de 2,3% sur un an aux Etats-Unis et plonger de 13% en Chine --deux marchés cruciaux pour lui.

Il y a une vingtaine d'années, l'ex-dirigeant Carlos Ghosn était déjà parvenu à relancer Nissan après son arrivée à la tête du groupe nippon, en réduisant les fournisseurs inefficaces et multipliant les nouveaux modèles, mais "il s'agissait d'options faciles dans les années 90, et il faudra un miracle pour redresser la barre aujourd'hui", commente Amir Anvarzadeh, analyste chez Asymmetric Advisors, cité par l'agence Bloomberg.

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