Vitesse limitée à 80 km/h: c'est parti!

Routes, radars, habitudes de conduite... Ce qui va changer avec l'entrée en vigueur au 1er juillet de la limitation à 80 km/h de la vitesse sur 400.000 kilomètres de routes françaises.

 

QUELLES ROUTES SONT CONCERNÉES ?

La limitation de vitesse sera de 80 km/h sur les 400.000 kilomètres de routes nationales et départementales bidirectionnelles (à double sens) sans séparateur central (terre-plein, muret, glissière). Ce sera la vitesse maximale autorisée par défaut, donc celle à respecter en l'absence de panneaux.

Elle restera toutefois à 90 km/h sur les sections à quatre voies (2x2 voies), c'est-à-dire les routes ou portions de routes où les dépassements peuvent se faire sans pénétrer sur la file dans le sens opposé.

Dans le cas d'une route à trois voies (deux voies dans un sens, une dans l'autre), la vitesse sera limitée à 90 km/h dans le sens comportant deux voies, où les dépassements sont sécurisés par une ligne continue centrale. La voie en sens inverse est, elle, limitée à 80 km/h.

Si la voie centrale n'a pas d'affectation spécifique à un sens ou l'autre, la limitation est de 80 km/h dans les deux sens de circulation.

 

UNE MÊME LIMITATION POUR TOUS ?

A compter du 1er juillet, tous les véhicules et conducteurs sont visés par la nouvelle limitation. Il n'y a donc aucun changement pour les poids lourds et les conducteurs novices, déjà limités à 80 km/h.

Les opposants au 80 km/h considèrent notamment comme dangereuse cette uniformisation de la vitesse maximale autorisée car, selon eux, le différentiel de 10 km/h avec les poids lourds permettait de les dépasser plus facilement et plus sûrement.

Par temps de pluie, la limitation reste à 80 km/h.

 

DES FLASHES DÈS LE 1ER JUILLET ?

Tous les radars seront paramétrés pour la date fatidique, assure-t-on à la Sécurité routière.

Un automobiliste pris en infraction à 90 km/h le 1er juillet sur une route qui vient de changer de limitation de vitesse devra donc s'acquitter de 68 euros d'amende et se verra retirer un point sur son permis.

"L'éventuel surplus des amendes perçues par l'État liées à l'abaissement de la vitesse à 80 km/h, sera affecté à un fonds d'investissement pour la modernisation des structures sanitaires et médico-sociales spécialisées dans la prise en charge des accidentés de la route", assure le ministère de l'Intérieur.

"La loi est la loi, elle va être appliquée", a prévenu vendredi le Premier ministre Edouard Philippe, ajoutant toutefois avoir "demandé à l'ensemble des forces de gendarmerie et de police de faire de la pédagogie et de l'information dans les premiers jours".

 

CHANGEMENT DE VITESSE, CHANGEMENT D'HABITUDES ?

Cette baisse de la vitesse maximale autorisée va légèrement rallonger les temps de trajet des automobilistes. Selon la Sécurité routière, il faudra compter 50 secondes de plus pour un trajet de 10 kilomètres, deux minutes pour 25 kilomètres.

Mais cela permettra aux conducteurs d'économiser 120 euros par an de carburant, fait-elle valoir, en soulignant que, selon des estimations de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), ce ralentissement pourra réduire de 30 % les émissions de polluants.

 

Alors que se profilent les grands départs estivaux, les automobilistes français et étrangers vont devoir lever le pied. La vitesse maximale autorisée est abaissée sur toutes les routes à double sens, à une voie chacune, sans séparateur central (barrière, terre plein...), soit 40 % du réseau routier français.

Depuis l'annonce le 9 janvier, associations d'automobilistes et de motards ont multiplié les manifestations et pétitions face à une mesure "inutile" et "politique", selon Pierre Chasseray, délégué général de 40 millions d'automobilistes.

Parlementaires et élus locaux de tous bords se sont insurgés contre cette disposition qui pénalise selon eux les régions rurales, où se trouvent l'essentiel des routes concernées. En vain.

L'exécutif est resté intransigeant, emmené par le Premier ministre Edouard Philippe qui s'est toujours dit "prêt à assumer l'impopularité" de la mesure. En dépit des spots et campagnes médiatiques déployés ces dernières semaines, 74 % des Français s'y déclaraient opposés dans un sondage mardi.

"L'objectif, ça n'est pas d'emmerder le monde. L'objectif, c'est de faire en sorte qu'il y ait moins de morts et moins de blessés graves", a martelé Edouard Philippe vendredi, rappelant le "coût humain terrifiant" des accidents de la route qui ont fait 3.684 morts et 76.840 blessés en 2017.

Selon le gouvernement, baisser la vitesse de 10 km/h permettra de sauver jusqu'à 400 vies par an, et ainsi d'inverser durablement la courbe de la mortalité routière qui, après avoir atteint un plus-bas historique en 2013, a connu un inquiétant rebond entre 2014 et 2016.

 

Quelques récalcitrants

Selon la Sécurité routière, ces routes ont concentré 55 % des accidents mortels en 2017.

"La vitesse est la première cause d'accidents mortels et quand elle n'est pas une cause, elle est un facteur aggravant des accidents", ajoute la présidente de la Ligue contre la violence routière Chantal Perrichon, qui milite depuis des années pour les 80 km/h.

Le gouvernement a annoncé qu'il évaluerait les effets de la mesure au 1er juillet 2020.

Vent debout depuis six mois, associations d'automobilistes et de motards contestent son efficacité en termes de sécurité routière, tout autant que le "passage en force" du gouvernement pour l'imposer à l'opinion.

Encore samedi, quelques centaines de motards ont manifesté leur "colère" à Paris en qualifiant la mesure de d'"aberrante" et de "pompe à fric".

"C'est juste un racket monstrueux, ils ne savent plus quoi faire pour trouver du fric. Ca va faire chier le monde, ça va créer des embouteillages et des accidents. C'est complète absurde", a protesté Gilles, 59 ans, l'un des manifestants.

Des élus, de zones rurales notamment, dénoncent une mesure "parisianiste" faite au détriment des campagnes qui ont déjà le sentiment d'être isolées et délaissées.

Au sein même du gouvernement, le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb et le ministre de la Cohésion des territoires Jacques Mézard n'ont pas caché leur réserve.

Depuis la publication du décret le 17 juin, la grande majorité des élus locaux se sont toutefois pliés -même a minima- à leurs obligations et ont fait installer des panneaux signalant la nouvelle limitation de vitesse.

Quelques-uns rechignent toutefois, notamment en Indre-et-Loire et en Creuse, où la présidente (LR) du conseil départemental Valérie Simonet a annoncé qu'elle ne mettrait aucun moyen "ni financier, ni technique, ni humain" pour cette réforme.

"Ces rares élus se mettent en marge de la légalité, ce qui est gênant pour une autorité publique. Ne pas donner les bonnes indications, c'est faire prendre aux automobilistes le risque d'une amende ou pire, d'un accident", déplore le délégué interministériel à la Sécurité routière, Emmanuel Barbe.

"Il y a des voies de droit" pour contester, ajoute-t-il, en référence à trois recours déposés devant le Conseil d'Etat.

En Corrèze, le département a choisi de protester par l'ironie. Aucun panneau à 80 km/h n'a été installé. Les autorités ont préféré signalé la fin des zones à 90 km/h avec des inscriptions "Le nouveau monde vous demande de ralentir".

© 2018AFP