Trump bouscule aussi les normes antipollution

La marche arrière, annoncée par le président Donald Trump, sur les normes anti-pollution des véhicules ne signifie pas nécessairement que les voitures américaines vont polluer davantage à l'avenir, même si les défenseurs de l'environnement dénoncent cette mesure, estiment certains experts.

Le nouveau président américain a annoncé la remise en cause des objectifs fixés par l'Agence de protection de l'environnement (EPA) pour la période 2022-2025. Cela ouvre une nouvelle période de consultations, qui apporte satisfaction aux demandes des constructeurs automobiles.

Le nouveau dirigeant de l'EPA, Scott Pruitt, qui se range dans le clan des climato-sceptiques, a salué cette décision mais l'ONG Natural Resources Defense Council a affirmé qu'elle allait conduire à la généralisation de grosses voitures polluantes. Le sénateur démocrate Charles Schumer l'a qualifiée "d'une des premières étapes de l'offensive tout azimut lancée par l'administration Trump pour démanteler d'importantes protections environnementales".

"Il est raisonnable de penser qu'une législation moins contraignante va être présentée à l'avenir", estime David Whiston, un analyste pour le secteur automobile chez Morningstar. Il s'attend toutefois à la poursuite des investissements dans les technologies de propulsion hybrides ou électriques, généralement plus efficaces pour diminuer les émissions polluantes.

"Sur le long terme, les constructeurs vont continuer d'investir dans les voitures hybrides, électriques et à hydrogène quelle que soit la législation en vigueur", affirme-t-il.

Selon le Conseil International pour des transports propres (ICCT), les constructeurs américains ont déjà lourdement investi dans des technologies et des usines pour répondre aux normes qui avaient été imposées par la précédente administration démocrate et qui sont aussi prévues sur d'autres marchés comme l'Europe et la Chine.

"Tout ce qui remet en question les normes 2025 porte le risque de voir les Etats-Unis à nouveau perdre du terrain dans le domaine technologique avec des conséquences très claires pour leurs entreprises", estime ce centre de réflexion.

 

4,3 litres aux 100

La loi américaine CAFE (Corporate Average Fuel Economy) impose aux constructeurs une moyenne de consommation par mile parcouru - régulièrement révisée - pour l'ensemble de leurs gammes. Ce texte les contraint de fait à produire des modèles sobres pour continuer à pouvoir en vendre des plus gourmands comme les SUV (4X4 de ville) et les pickups (camionnettes à plateau).

La loi abrogée par Donald Trump et qui avait été adoptée dans les dernières semaines de l'administration Obama, prévoyait des augmentations graduelles de l'autonomie des véhicules pour atteindre un objectif de 54,5 miles pour un gallon d'essence (4,32 litres aux cent kilomètres) en 2025.

D'ores et déjà, et dans la perspective de répondre à ces normes, les constructeurs utilisent des matériaux plus légers et travaillent sur l'aérodynamisme en plus des nouvelles technologies pour rendre les moteurs plus économes.

Mais cela ne les a pas empêchés de se réjouir de l'initiative de Donald Trump. "En décidant de remettre à plat cette initiative, l'analyse l'a emporté sur la politique pour aboutir à une décision finale sur laquelle tout le monde s'entendra à la fois pour les émissions de gaz à effet de serre et les normes de consommation", a estimé Mitch Bainwol, président de l'Alliance des constructeurs automobiles américains.

Efraim Levy, analyste chez CFRA, souligne que cela va aussi permettre de réduire les coûts en recherche et en développement et de faire passer ces économies aux consommateurs en réduisant le prix des voitures.

Mais des Etats américains comme la Californie peuvent aussi décider de continuer à appliquer des normes plus strictes que celles décidées par l'EPA, comme ils le font déjà, obligeant les constructeurs à s'y conformer s'ils veulent y vendre leurs véhicules.

L'administration Trump pourrait décider d'engager une guerre juridique pour essayer de les en empêcher mais celle-ci durerait de longues années sans assurance sur la décision finale qui incomberait à la Cour suprême.

"Autant les constructeurs souhaitent une certaine souplesse dans l'application des normes, autant ils ne veulent pas d'incertitude", souligne Nic Lutsey, directeur de programme à l'ICCT.

© 2017AFP