Toyota : Akio Toyoda cède la présidence à Koji Sato

Akio Toyoda va quitter en avril son poste de P-DG de Toyota au profit de Koji Sato. Akio Toyoda était progressivement devenu un capitaine charismatique capable de hisser son groupe au sommet du marché mondial de l'automobile, tout en ayant tardé à se lancer sérieusement dans l'électrique.

Agé de 66 ans, M. Toyoda, qui était PDG depuis 2009, va prendre la présidence du conseil d'administration du groupe à la place de Takeshi Uchiyamada, 76 ans.

Koji Sato, 53 ans, était depuis janvier 2021 directeur opérationnel et directeur de la marque. Il était aussi président de Lexus International Co, pilotant ainsi les activités à l'étranger de la marque haut de gamme de Toyota.

Il a intégré Toyota en 1992, après des études d'ingénieur à la prestigieuse université Waseda de Tokyo.

Akio Toyoda a loué jeudi les vertus de son successeur lors d'une conférence de presse en ligne, en particulier sa "jeunesse", son amour des voitures et le dynamisme de son équipe.

"Pour promouvoir le changement à une époque où le futur est imprévisible, le chef doit continuer à rester sur la ligne de front. Pour cela, l'endurance, l'énergie et la passion sont indispensables", a expliqué M. Toyoda.

"Il est jeune et il a des collègues dans le même état d'esprit, aussi je m'attends à ce qu'il puisse dépasser les limites que je n'ai pas pu franchir moi-même", a-t-il encore ajouté.

"Je suis un ingénieur et je me suis longtemps consacré au développement de voitures. J'aime fabriquer des voitures", a déclaré jeudi M. Sato.

 

Le défi de la 3ème génération

Agé de 66 ans, Akio Toyoda est le petit-fils de Kiichiro Toyoda, le célèbre industriel nippon qui dans les années 1930 a transformé l'entreprise familiale de métiers à tisser en constructeur automobile (le nom "Toyoda" sera alors transformé en "Toyota", considéré comme plus chanceux).

Son père Shoichiro Toyoda avait lui aussi été un dirigeant emblématique du groupe dans les années 1980-1990.

Etre à la hauteur de ses glorieux aînés est pour Akio Toyoda une obsession, et une pression constante.

"Vous avez peut-être déjà entendu le proverbe disant que la troisième génération conduit à la ruine. J'ai entendu cela toute ma vie. Et je suis déterminé à prouver le contraire", confiait-il en 2017.

Enfant, il rêvait de devenir chauffeur de taxi et est aujourd'hui passionné de sport automobile - il a lui-même participé à des compétitions sous le pseudonyme de "Morizo".

Après des études de droit à la prestigieuse université Keio de Tokyo, puis dans une école de commerce américaine, il intègre Toyota en 1984, grimpant progressivement les échelons selon la tradition. Il se démarque toutefois en fondant en 1998 Gazoo.com, un portail internet japonais dédié à l'automobile.

 

Numéro un mondial

En 2009, à 53 ans, il devient le plus jeune PDG de Toyota, à un moment où le groupe, durement touché par la crise économique mondiale, cherche à se ressouder autour du symbole de la famille fondatrice.

Eludant à ses débuts un scandale géant de problèmes de qualité obligeant son groupe à rappeler des millions de véhicules dans le monde, il finit par se livrer à un humiliant exercice de contrition, y compris devant le Congrès américain.

Mais Toyota se relève rapidement sous la houlette de son nouveau PDG, qui renforce notamment les contrôles internes.

Le groupe retient aussi la leçon du séisme, tsunami et accident nucléaire de Fukushima en 2011 en approfondissant ses liens avec ses fournisseurs, pour gagner en réactivité en cas de perturbations de ses approvisionnements.

Ces enseignements lui ont servi dix ans plus tard pour gérer mieux que d'autres la pénurie mondiale de semi-conducteurs après la pandémie de Covid-19, même si sa production en a aussi été affectée.

Dans les années 2010 le groupe se dispute avec l'allemand Volkswagen la place de numéro un mondial de l'automobile en ventes en volume, grâce notamment à ses excellents positionnements en Amérique du Nord et en Chine. Toyota trône de nouveau au sommet de ce classement depuis 2020.

 

Virage électrique

Mais plutôt que de ne parler que de chiffres, Akio Toyoda préfère véhiculer des valeurs et des concepts d'entreprise, souvent japonais. Sa parole dans les médias est rare, sauf dans le journal interne de son groupe, le "Toyota Times", qui frise le culte de sa personnalité.

Le PDG prend conscience que Toyota, à la mentalité historiquement conservatrice comme de nombreuses sociétés japonaises, pourrait rapidement se ringardiser face aux profondes mutations énergétiques et technologiques de son secteur.

Désireux d'imiter l'esprit start-up, il tente de redéfinir Toyota comme une "entreprise de mobilité" et multiplie les partenariats et investissements dans les nouvelles technologies.

Champion des moteurs hybrides et pionnier de l'hydrogène, Toyota a cependant tardé à accélérer dans les véhicules à batteries électriques, avant d'annoncer des d'investissements colossaux dans ce segment à partir de fin 2021.

Akio Toyoda cachait mal sa jalousie vis-à-vis du succès de l'américain Tesla, dont la capitalisation boursière a allègrement dépassé celle du groupe nippon depuis 2020.

Tesla a trouvé une bonne "recette" mais Toyota propose lui un "menu complet" dans les solutions d'électrification, a-t-il vanté un jour.

Akio Toyoda a lancé un projet futuriste qui n'a rien à envier à la démesure des géants de la Silicon Valley: "Woven City" (la ville tissée), une cité-laboratoire des mobilités connectées dont le chantier a démarré en 2021 au pied du Mont Fuji.

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