Record de production au Royaume-Uni

La production britannique de voitures a atteint l'an passé un niveau sans précédent au 21e siècle, mais cette industrie en renouveau se prépare à des temps incertains avec l'ouverture des négociations sur le Brexit.

L'Association britannique des constructeurs et des vendeurs d'automobiles (SMMT) a annoncé jeudi qu'environ 1,722 million de voitures avaient été assemblées au Royaume-Uni en 2016, soit 8,5% de plus qu'en 2015 et davantage qu'aucune autre année depuis 1999.

Son directeur général, Mike Hawes, a souligné que près de 8 voitures sur 10 produites au Royaume-Uni avaient été exportées, et que parmi ces dernières 56% étaient parties à destination des autres pays de l'Union européenne, notamment vers l'Allemagne, l'Italie et la France - vers laquelle les exportations ont bondi de 47,2%.

"L'année 2016 a été un succès formidable pour l'industrie automobile britannique. Les ventes sur le marché britannique ont établi en outre un record avec plus de 2,6 millions de véhicules écoulés. L'industrie est en bonne forme", s'est réjoui M. Hawes auprès de l'AFP.

La construction d'automobiles a connu des années de marasme au Royaume-Uni, mais la production repart en flèche depuis quelques années et cette décennie pourrait être la plus prospère pour ce secteur depuis les années 1970.

Depuis, toutes les grandes marques britanniques sont passées sous pavillon étranger : Mini et Rolls-Royce appartiennent à BMW, Bentley à Volkswagen, tandis que Jaguar et Land Rover sont dans l'escarcelle du géant indien Tata Motors.

Mais la production d'automobiles au Royaume-Uni n'en a pas moins vigoureusement rebondi depuis la sortie de la récession née de la crise financière internationale. Ces groupes ont en effet massivement investi sur place, tout comme d'autres constructeurs étrangers présents sous leurs propres marques - notamment les japonais Nissan, Toyota et Honda, qui produisent à eux trois la moitié des voitures made in Britain.

 

Une chaîne perturbée ?

Après avoir obtenu des garanties - non publiées - du gouvernement britannique, le PDG de Nissan Carlos Ghosn a donné son feu vert en octobre à de nouveaux engagements sur son site de Sunderland (nord-est de l'Angleterre). Et le président de Toyota s'est voulu plutôt rassurant sur sa présence.

Mais globalement, les investissements dans le secteur, qui atteignaient quelque 2,5 milliards de livres par an ces dernières années (2,9 milliards d'euros au taux de change actuel), ont déjà décru l'an passé, à un peu moins de 1,7 milliard de livres (2 milliards d'euros). D'après M. Hawes, il s'agit pour partie d'un retour de bâton après quelques crus exceptionnels, mais aussi du signe d'un certain attentisme chez les constructeurs qui attendent d'y voir plus clair.

"2017 sera plus compliquée, nous sommes dans une période beaucoup plus incertaine. Nous ne savons pas quelle sera notre future relation avec l'Europe et avec les autres marchés à l'exportation. Nous voyons en outre une hausse de l'inflation et des prix qui pourraient affecter le marché", prévient-il.

La semaine dernière, la Première ministre Theresa May a officialisé un secret de polichinelle : le Royaume-Uni quittera le marché unique européen en même temps que l'Union européenne.

Pour le secteur automobile, ce dernier a garanti entre le Royaume-Uni et les autres pays de l'UE un commerce sans droit de douanes des voitures mais aussi des pièces détachées utilisées pour leur assemblage. La production automobile britannique est aujourd'hui complètement intégrée au marché européen, qui lui fournit par exemple la majeure partie de ses pièces détachées.

Forts d'une industrie dont dépendent directement ou non plus de 800.000 emplois, les professionnels du pays vont donc surveiller fébrilement les négociations entre Londres et Bruxelles, pour savoir où sera placé le curseur des futurs droits de douane, entre le 0% actuel et les 10% des règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) qui s'appliqueraient à défaut d'accord.

Thomas Sampson, professeur à la London School of Economics, prévient qu'outre les tarifs douaniers, les producteurs britanniques pourraient le cas échéant souffrir de l'impact de nouvelles barrières non-tarifaires. "Ils devraient alors réorganiser l'ensemble de leur chaîne d'approvisionnement, ce qui risque de perturber de façon importante l'industrie automobile" du pays, prévient-il.

Reste l'échappatoire des marchés non-européens. Mais le premier, celui des Etats-Unis vers lequel partent quelque 15% des voitures made in Britain, est soumis aux interrogations liées aux promesses protectionnistes de Donald Trump, tandis que les ventes britanniques vers les autres pays sont très loin d'approcher les résultats conquis dans la proche Europe continentale.

pn/rba/pb

© 2017AFP