Pollution: la circulation fait suffoquer Téhéran

Air saturé en particules nocives et écoles fermées par précaution: malgré des restrictions à la circulation automobile et l'activité industrielle, les 8,5 millions d'habitants de Téhéran suffoquaient dimanche en raison d'une pollution atmosphérique très élevée depuis plusieurs jours.

Les autorités de la province de Téhéran ont annoncé samedi soir la fermeture de tous les établissements d'enseignement primaire, sauf dans deux villes, et cette mesure pourrait être prolongée lundi.

La concentration en particules fines (PM2,5) est montée dimanche matin jusqu'à 185 microgrammes par mètre cube dans le sud de Téhéran et 174 dans le centre, selon les autorités municipales. L'OMS recommande un taux inférieur à 25 µg/m3 en moyenne sur 24 heures.

Les mines et les cimenteries de la province de Téhéran ont également été fermées pour la journée de dimanche, et les restrictions à la circulation imposées habituellement dans le centre de la capitale ont été renforcées. Les personnes fragiles (enfants, femmes enceintes, personnes âgées ou souffrant de problèmes cardiovasculaires) ont été priées de rester chez elles.

Depuis plusieurs semaines, la chaîne montagneuse de l'Alborz, qui domine Téhéran, apparaît voilée à certaines heures de la journée par une brume de pollution. Dimanche, la montagne se dérobait totalement à la vue, oblitérée par le nuage toxique.

Nombre d'habitants de la capitale ont pris l'habitude de sortir avec un masque antipollution, comme Ali Ebrahimian, retraité, qui explique à l'AFP être sorti de chez lui uniquement pour les besoins d'"une affaire urgente à régler".

 

'Immobilisme des responsables'

"Le gouvernement ne fait rien (...) Je n'ai pas peur de le dire. A qui doit-on s'adresser pour cet air pollué? Que font-ils?" s'indigne Fatemeh Assadi, une femme d'une soixantaine d'année.

"Tout le monde connaît les raisons (de la pollution), mais les responsables ne font rien", estime Hossein, un homme d'une soixantaine d'années également.

"Téhéran suffoque", mais "des centaines de milliers de voitures sont construites tous les ans", dit-il. "Ils construisent dans les montagnes, ils détruisent les forêts. On ne veut pas de pétrole, on ne veut pas d'essence, il faut que l'avenir de nos enfants soit assuré avec de l'air pur."

Selon des prévisions officielles, la production automobile iranienne devrait dépasser cette année 1,5 million de véhicules, qui viendront s'ajouter à quelque 20 millions de voitures, camions et fourgonnettes déjà en circulation.

Tous les ans, à cette période de l'année, la pollution atteint des pics à Téhéran --agglomération située entre 1.400 et 1.800 mètres-- en raison du phénomène dit de l'"inversion thermique": l'air froid en altitude empêche l'air chaud et pollué de se dégager. Cette année, l'absence de pluie depuis le début de l'automne a encore accentué le problème.

Selon les médias iraniens, la pollution à Téhéran, ville habituée aux embouteillages monstres, est provoquée à 80% par les gaz d'échappement.

 

 'Espoir' à long terme ?

Lors d'une conférence de presse en octobre, le maire de Téhéran, Mohammad Ali-Najafi avait déclaré que le problème de la circulation automobile était "la première préoccupation" des habitants.

Parlant de sa volonté de "développer les transports en commun", et d'améliorer l'efficacité d'un réseau routier totalement saturé, il avait néanmoins ajouté que "le problème du transport urbain ne (pouvait) pas être réglé à court terme".

A Tabriz et Oroumieh, dans le nord-ouest de l'Iran, les écoles ont fermé dimanche pour la seconde journée consécutive, selon l'agence officielle iranienne Irna. Dans d'autres villes industrielles, notamment Ispahan (centre), Machhad (nord-est) et Arak (centre), la pollution a atteint des niveaux très élevés mais les écoles n'ont pas été fermées.

La pollution atmosphérique en Iran est encore loin des niveaux désastreux relevés en Chine ou en Inde, comme à New Delhi où la concentration en particules fines a dépassé récemment les 1.000 µg/m3.

"On étouffe, mais on garde espoir", titrait dimanche le quotidien Haft-e Sobh, en soulignant que le nombre de jours "très pollués" à Téhéran est passé de 98 par an il y a cinq ans à 48 l'année dernière, mais qu'il atteint déjà 58 cette année (encore loin d'être achevée puisque l'année iranienne se termine le 20 mars).

Fatidique, le journal juge que "l'espoir d'une amélioration de la situation de la ville est vivant, si bien sûr on échappe à la mort".

© 2017AFP