Mitsubishi Motors plonge de 20% en Bourse

L'action Mitsubishi Motors a plongé de plus de 20% jeudi à la Bourse de Tokyo au lendemain de l'aveu de manipulations de données, une affaire qui vient éclabousser un groupe à l'image déjà ternie par un scandale au début des années 2000.

Le titre, qui avait déjà perdu 15% mercredi, a chuté à la clôture de 20,46% à 583 yens, soit une très lourde perte de 150 yens, le recul maximum autorisé pour la journée.

Les investisseurs redoutent l'impact de ce scandale sur le constructeur connu pour ses 4x4 Outlander et Pajero. A ce stade, au moins 625.000 mini-voitures uniquement vendues au Japon sont concernées, mais un nombre plus important d'automobiles pourrait être concerné.

Dès jeudi matin, des fonctionnaires du ministère des Transports ont perquisitionné un Centre technique du constructeur japonais dans la préfecture d'Aichi (centre).

"C'est une affaire extrêmement grave", a déclaré le porte-parole du gouvernement, Yoshihide Suga, qui a exigé "des explications".

De fait, le patron de Mitsubishi Motors a avoué mercredi un embellissement intentionnel des performances énergétiques de plusieurs modèles de véhicules vendus au Japon, dont deux commercialisés par son compatriote Nissan dans le cadre d'un accord de partenariat. L'écart entre la consommation réelle et celle déclarée serait de l'ordre de 5 à 10% du fait d'une fraude sur les chiffres relatifs aux pneus.

L'aveu a été fait après la découverte de divergences par Nissan, dont le titre n'a, lui, pas souffert: il a gagné 3,14% à 1.048 yens, profitant de la bonne orientation du marché.

Des investigations plus poussées vont être menées en interne, portant notamment sur d'autres voitures commercialisées hors de l'archipel.

- 'Loyauté' -

A l'image du cas Volkswagen, "les dommages seront importants", a averti le dirigeant de Mitsubishi Motors, Tetsuro Aikawa. Le géant allemand, qui a avoué en septembre dernier avoir truqué les moteurs diesel de 11 millions de voitures dans le monde pour les faire paraître moins polluantes qu'elles ne sont en réalité, s'apprête à publier une perte pour l'année 2015, vraisemblablement de plusieurs milliards.

Outre l'inévitable impact sur sa réputation, la société japonaise se prépare elle aussi à subir des coûts conséquents: elle devra probablement verser des compensations financières à ses clients ainsi qu'à Nissan, des indemnités à d'éventuels plaignants et s'expose aussi à des pénalités de la part du gouvernement.

Mitsubishi Motors, créé en 1970 à partir de la division automobile de Mitsubishi Heavy Industries (MHI), avait déjà été ébranlé par un scandale de camouflage de défauts, au début des années 2000, qui lui avait causé de graves difficultés financières.

Actuellement fort de quelque 30.000 salariés, le groupe s'est relevé grâce à l'intervention des entreprises de la galaxie Mitsubishi qui lui ont apporté des fonds. Il avait alors publiquement promis de se doter d'une meilleure gouvernance et d'appliquer des contrôles plus stricts.

Peine perdue, les leçons n'ont pas été tirées, a déploré Hideyuki Kobayashi, professeur à l'université Hitotsubashi de Tokyo et auteur d'un ouvrage sur les déboires de la firme en 2005.

"Mitsubishi Motors doit être durement sanctionné, sinon la compagnie ne changera pas et les réformes nécessaires ne seront pas menées", a-t-il estimé, interrogé par l'AFP.

Issu du grand conglomérat ("zaibatsu") Mitsubishi démantelé après la seconde guerre mondiale, le constructeur souffre d'une culture d'entreprise qui implique "une loyauté" à toute épreuve "envers la compagnie et son président, et non envers les clients", souligne l'expert.

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