Livraisons Tesla en retard, PDG jugé: Wall Street s'alarme

Les inquiétudes sur l'avenir du constructeur automobile Tesla ont refait brusquement surface jeudi avec des livraisons de véhicules bien en-dessous des attentes, donnant des sueurs froides aux investisseurs de Wall Street au moment où son PDG Elon Musk était jugé à New York pour outrage.

Voir aussi: Tesla: Elon Musk jugé pour outrage à autorité

Le constructeur américain a livré 63.000 véhicules à ses clients au cours des trois premiers mois de l'année, soit 31% de moins qu'au trimestre précédent et moins que les 76.000 unités attendues en moyenne par les analystes interrogés par le cabinet FactSet.

Au centre des préoccupations des investisseurs, les livraisons de Model 3 --voiture censée transformer Tesla en producteur de masse-- n'ont été que de 50.900 unités, contre 54.600 anticipées. Tesla mise pourtant beaucoup sur cette voiture, plus compacte et moins onéreuse que ses Model S et Model X.

Ces chiffres décevants ont eu pour conséquence de faire dégringoler le titre de 8,23% à Wall Street, à 267,78 dollars.

Le rapport publié par Tesla est "bien pire qu'anticipé", selon les analystes de JPMorgan Chase, qui ont revu de ce fait à la baisse leur perspective sur le cours de l'action, de 215 à 200 dollars.

Les craintes concernant le constructeur de voitures électriques ne sont pas nouvelles, le groupe soulevant fréquemment des interrogations quant à ses objectifs sur ce marché. Mais elles sont brusquement revenues sur le devant de la scène jeudi après l'annonce de ces chiffres.

Dans son rapport mercredi, Tesla a mis en avant la forte augmentation des délais de livraison, conséquence des commandes importantes en provenance d'Europe et de Chine. "Nous n'avions livré au 21 mars que la moitié des volumes du trimestre", a justifié le groupe en affirmant qu'environ 10.600 voitures étaient actuellement en transit.

 

"Incongruité"

Fin mars, le patron de Tesla Elon Musk avait déjà demandé "de l'aide" à ses salariés dans un courriel, les priant de faire des délais de livraison des voitures leur "priorité", selon la presse américaine.

"La livraison de véhicules dans le monde entier depuis la Californie présente des défis logistiques", affirme la société Briefing dans une note jeudi, rappelant que Tesla ne peut enregistrer de rentrée d'argent avant que la commande n'arrive à destination.

Ces analystes soulignent également le poids de la baisse en début d'année d'un crédit d'impôt fédéral accordé aux voitures propres aux Etats-Unis, encourageant de fait des achats par anticipation fin 2018, malgré l'annonce par Tesla depuis de deux baisses de prix consécutives pour parer au flétrissement de l'incitation fiscale.

"En résumé, ce rapport alimente les craintes déjà bien présentes au premier trimestre d'une baisse de la demande", ont noté les analystes de Briefing.

Ces incertitudes pourraient peser sur les objectifs de Tesla, qui prévoit toujours de livrer 360.000 à 400.000 véhicules sur l'ensemble de l'année.

Ce niveau, réaffirmé par le constructeur automobile mercredi, entre toutefois en contradiction avec un tweet de son PDG Elon Musk, qui avait assuré en février que la société allait produire 500.000 voitures en 2019. Une affirmation sur laquelle il était toutefois revenu quelques heures plus tard.

"L'incongruité désormais manifeste entre les anticipations du PDG et les données officielles de l'entreprise pourraient heurter la perception des investisseurs lors des futures prises de parole managériales et éroder un peu plus la confiance dans le titre en Bourse", a affirmé JPMorgan Chase.

Le compte Twitter d'Elon Musk lui a justement valu d'être jugé jeudi à New York pour outrage à autorité, accusé par le gendarme de la Bourse (SEC) d'avoir multiplié des messages dont le contenu était susceptible de tromper les investisseurs et d'influencer le cours de l'action Tesla.

Une juge fédérale a renvoyé les deux parties dos à dos, leur accordant deux semaines pour régler leur différend.

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