Les VO électriques cherchent encore leurs marques

Les premières voitures électriques de grande diffusion arrivent en occasion et les constructeurs cherchent à stabiliser un marché encore confidentiel en France, sur fond d'inquiétudes quant à l'obsolescence et donc à la cote de modèles très particuliers.

Encore inexistantes il y a cinq ans, les électriques ont trouvé leur (petite) place dans le paysage automobile français: 100.000 d'entre elles ont été immatriculées, a révélé le 24 mars l'Association nationale pour le développement de la mobilité électrique (Avere-France).

Si les électriques représentent quelque 0,25% du parc roulant d'automobiles et d'utilitaires légers, les ventes, elles aussi faibles par rapport au total, connaissent une nette progression depuis le début de l'année: 1,43% du marché du neuf en janvier et février contre 1,08% pendant tout 2016.

Le marché de l'occasion reflétant le marché du neuf avec quelques années de retard, les premières Renault Zoé (sortie en 2012) et Nissan Leaf (2011) commencent à être proposées en seconde main, au compte-gouttes toutefois.

"Les volumes tournent en France autour de 500 unités par mois, cela a à peu près triplé en trois ans", explique à l'AFP Vincent Hancart, responsable de la filiale française du spécialiste des annonces d'occasion AutoScout24.

Un chiffre "cohérent" pour Marie Castelli, secrétaire générale de l'Avere-France, qui a relevé 4.000 transactions dans l'Hexagone l'année dernière. Une larme (0,07%) dans un océan de 5,6 millions de voitures d'occasion.

Pourtant, les constructeurs, après avoir vendu des autos neuves, s'intéressent de très près à leur devenir en occasion.

"C'est un gros sujet, car du dynamisme du marché de l'occasion dépend aussi le marché du neuf", confie Mme Castelli à l'AFP: "celui qui achète de l'électrique sera rassuré sur le fait que ça se revend facilement, que ce soit des particuliers ou des professionnels".

 

"Effet d'obsolescence"

Et pour les constructeurs, "80% des ventes se font en location longue durée. Il y a un moment où les véhicules électriques vont revenir, il va bien falloir qu'ils les revendent", dit-elle.

"L'année 2017 va être importante, on va commencer une vraie politique du véhicule d'occasion électrique", confirme à l'AFP Gilles Normand, nouveau directeur des véhicules électriques de Renault, leader du marché du neuf avec plus de 70% des ventes "zéro émission" en France.

Il assure que "quand on en rentre une (d'occasion), elle repart tout de suite" entre les mains d'un client. Renault se singularise en louant les batteries à ses clients de voitures neuves, et a adopté le même système pour l'occasion, un "facteur qui rassure le client" selon lui.

Car si les voitures électriques, "plus simples, ne nécessitent pas beaucoup d'entretien" par rapport aux thermiques, selon Mme Castelli, l'état de la batterie, qui se dégrade à chaque recharge, peut inquiéter les possibles acquéreurs. Or, son coût représente déjà un tiers du prix de l'auto neuve.

C'est avec cette problématique à l'esprit que Nissan a lancé fin 2016 un label "Occasions véhicules électriques" avec une inspection poussée et une prolongation de garantie de 12 à 36 mois jusqu'à 150.000 km.

Signe que les consommateurs restent méfiants, les valeurs résiduelles des voitures électriques au bout de trois ou quatre ans sont 15 points de pourcentage inférieures à celles des diesel, explique à l'AFP Yoann Taitz, directeur des opérations et des valeurs résiduelles chez Autovista France, spécialiste de la cotation des autos d'occasion.

Ces cotes, essentielles pour calculer le prix de revient kilométrique des voitures en location longue durée et des flottes, restent instables et "perturbées par les aides d'Etat" qui peuvent atteindre 10.000 euros contre la mise au rebut d'un ancien diesel, ajoute M. Taitz.

Autre facteur d'incertitude, le progrès technologique fulgurant des nouveaux modèles: la Zoé de nouvelle génération, commercialisée début 2017, offre une autonomie quasi doublée, rendant les premiers modèles moins attractifs.

"L'effet d'obsolescence est comparable à celui d'un téléphone portable (...) c'est d'ailleurs aussi pour cela que la dépréciation est supérieure à celle d'un véhicule thermique", analyse M. Taitz.

Les Français sont "prêts à basculer à notre sens sur la voiture électrique, mais il subsiste énormément d'inconnues", renchérit Christian Scholly, directeur général de l'Automobile Club association, qui réclame des pouvoirs publics davantage de lisibilité à long terme, en particulier en matière fiscale.

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