Les transports à hydrogène frémissent en France

Jusqu'ici reléguée au second plan derrière les véhicules électriques, la filière hydrogène française commence à se faire une place dans la mobilité propre, et les projets émergent: stations de recharges, ligne de bus, ou encore trains.

Le constructeur ferroviaire Alstom vient d'annoncer que 14 trains à pile à combustible, d'une autonomie de 1.000 kilomètres, viendraient remplacer, à partir de 2021, des trains diesel en Basse-Saxe (Allemagne). Une première mondiale, selon l'industriel français.

Outre ce contrat, ces derniers mois ont été prolifiques pour la filière: Pau a lancé le premier projet français de ligne de bus électriques, alimentés par de l'hydrogène, avec Engie (ex GDF-Suez) et le fabricant belge de bus Van Hool tandis que la région Rhône-Alpes veut déployer 20 stations de recharge et une flotte de 1.000 véhicules à hydrogène.

Même l'automobile s'y met. "Malgré certaines réticences des constructeurs français à s'engager" dans cette voie, les équipementiers Faurecia et Plastic Omnium, travaillent notamment sur des réservoirs à hydrogène, note Philippe Boucly, vice-président de l'Association française pour l'hydrogène et les piles à combustible (Afhypac).

Utilisé dans les véhicules électriques équipés de piles à combustible, l'hydrogène permet d'atteindre une autonomie plus importante qu'un véhicule électrique à batterie. Il est produit à partir de gaz naturel, combustible émettant du CO2, ou, de manière plus "verte", par électrolyse de l'eau, un mécanisme gourmand en éléctricité.

Les acteurs français du secteur se veulent donc optimistes, avec les récentes annonces françaises, qui font émerger "de manière très concrète au niveau du gouvernement la volonté de remplacer le diesel par les nouveaux carburants, comme le gaz, le biogaz et l'hydrogène", constate Charlotte de Lorgeril, associée au sein du cabinet Sia Partners.

"La France a fait un choix politique tourné vers l'électrique et aujourd'hui on voit que l'électricité ne peut pas répondre à tous les usages dans la mobilité", ajoute-t-elle.

Mais pour aller plus loin, les industriels demandent un soutien de l'Etat via "un plan hydrogène précis et inscrit dans la durée", plaident l'Afhypac et Mobilité hydrogène France.

La France a quelques grands acteurs, comme Air liquide ou Engie et tout un éco-système de PME et start-up (McPhy, Aaqius, Symbio FCell) mais qui "sont très fragiles" en l'absence du véritable démarrage de la filière, prévient Philippe Boucly.

"Il faut qu'on accélère sur les filières hydrogène ou électrique", avait aussi confié début septembre à l'AFP la ministre des Transports Elisabeth Borne, estimant que "l'Etat a aussi un rôle plus proactif à jouer pour aider à la structuration d'un certain nombre de filières sur des innovations de rupture".

 

Technologie chère

Aujourd'hui, l'hydrogène reste une technologie chère. "C'est compliqué d'avoir un modèle d'affaires, alors qu'il y a encore beaucoup de sujets à traiter" pour réduire les coûts, dans la production d'hydrogène, l'infrastructure de recharge, ou la pile à combustible elle-même, "surtout qu'il y a des concurrents", comme le gaz naturel ou le véhicule électrique, explique Gaëtan Monnier, de l'institut IFP Energies nouvelles.

Ailleurs en Europe, d'autres pays se mobilisent, notamment en Allemagne avec les constructeurs Audi, Mercedes-Benz ou BMW et les géants du gaz Linde group et Messer.

Alors que l'Europe est distancée pour la fabrication des batteries, le Vieux Continent ne semble pas vouloir rater le train de l'hydrogène, même s'il ne se concrétise qu'à long terme.

"Les Chinois essayent d'enterrer les véhicules thermiques parce qu'ils ont les batteries (...) donc l'Europe est en train de se questionner sur (la technologie) sur laquelle elle va miser", explique Gaëtan Monnier.

Selon une étude commandée par les industriels du secteur, l'hydrogène pourrait représenter près d'un cinquième de l'énergie totale consommée à l'horizon 2050 au niveau mondial, sous réserve que des "investissements significatifs" soient réalisés, estimés à "280 milliards de dollars américains d'ici à 2030".

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