Les boîtes automatiques ont conquis les français

Les boîtes de vitesses manuelles des automobiles seront-elles bientôt aussi dépassées que les téléphones à cadran et les machines à écrire? Les transmissions automatiques effectuent en tout cas une percée spectaculaire en France, pays qui leur a longtemps été rétif.

Si la baisse du diesel, en passe de perdre son statut de motorisation préférée des Français, a mobilisé l'attention ces derniers mois, la désaffection vis-à-vis des boîtes manuelles s'avère encore plus nette.

Sur les dix premiers mois de 2016, près du quart (23,99%) des voitures particulières neuves vendues dans l'Hexagone étaient en effet équipées de boîtes de vitesses automatiques, selon le Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA). Une progression de 26% sur un an en volume.

L'art du patinage de l'embrayage, du démarrage en côte et du passage des vitesses "à l'oreille", en fonction du régime moteur, est-il voué à se perdre? La tendance s'accélère: de 3% des ventes neuves en 1995, la part des boîtes automatiques en France est montée à 8% en 2004 et 20% en 2015.

Elle reste encore loin du niveau des Etats-Unis, pionnier des boîtes auto de grande série dès 1940 avec l'Hydramatic de General Motors, et où 96% des voitures particulières vendues neuves en 2015 n'étaient pas équipés de pédale de gauche. Même phénomène au Japon: Toyota confie y écouler 98% de ses modèles en automatique.

Mais en France et plus largement en Europe, certains modèles, en particulier les hauts de gamme, se vendent désormais en grande majorité avec une boîte automatique, s'accordent à constater les constructeurs.

Chez Renault, l'Espace, dont la cinquième génération a été révélée il y a deux ans, s'écoule ainsi à 90% en automatique en France, et à 85% en Europe. Le taux de pénétration de l'automatique sur l'Espace 4 n'était que de 16,7% sur le Vieux continent.

La grande berline du Losange, la Talisman, est automatique dans 66,5% des cas en France. "Sur (la compacte) Clio nous sommes à près de 11,6%, et (le 4x4 urbain) Captur à 25,6%", indique-t-on chez la firme de Billancourt. Sa proportion de ventes automatiques dans son fief a quintuplé en six ans pour atteindre 21,2% en septembre, encore plus qu'en Europe (18,2%).

 

Concentrés de technologie

Du côté de Peugeot, on relève une tendance similaire, surtout sur les modèles les plus récents: la toute nouvelle 3008 est jusqu'ici commandée à 65% en automatique, selon le patron de la marque, Jean-Philippe Imparato.

Un phénomène qu'il attribue à une boîte ergonomique, efficace et qui se marie bien avec un nouveau tableau de bord numérique. "On se laisse assez facilement transporter dans l'univers (du cockpit) et on n'a pas forcément envie d'une boîte manuelle", explique-t-il à l'AFP.

L'attitude des consommateurs vis-à-vis des automatiques "a beaucoup bougé en peu de temps, c'est vrai", constate Flavien Neuvy, directeur de l'Observatoire Cetelem de l'automobile. "On pensait qu'on était accroché à notre levier de changement de vitesses, mais petit à petit on le lâche".

Robotisées, adaptatives et dotées de jusqu'à 10 rapports, les boîtes automatiques d'aujourd'hui n'ont plus rien à voir avec les héritières des Hydramatic, synonymes de consommation plus élevée, de puissance fiscale alourdie, de fiabilité parfois problématique et de reprises poussives.

"Il n'y a plus de questions sur l'efficacité des boîtes auto" ni sur leur revente, indique M. Neuvy à l'AFP, en estimant que l'engouement du public pour l'automatique trouve aussi sa source dans le fait que les voitures haut de gamme en ont été équipées en premier.

De fait, le groupe Volkswagen, premier importateur, mentionne une proportion d'automatiques dans ses ventes de 40% cette année dans l'Hexagone, presque doublée en quatre ans, en grande partie grâce aux Audi dont les acheteurs optent à 63% pour ce type de transmission.

Le confort associé à la boîte automatique, en particulier dans les bouchons des grandes agglomérations qui obligent les conducteurs de manuelles à constamment débrayer, "fait que ceux qui l'essaient ne le regrettent pas et ne reviennent pas en arrière", assure Flavien Neuvy.

tq/ef/pb

© 2016AFP