Q : Donald Trump vient de signer le décret sur la construction d'un mur à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis promis durant sa campagne. Peut-on craindre maintenant une expulsion massive de migrants mexicains illégaux?
R : "S'il y a une crainte, c'est surtout du côté des migrants qui sont installés aux Etats-Unis et qui ne veulent pas revenir au Mexique. Il y a aussi une question logistique: comment organiser la déportation de millions de personnes? Mais il semble que Donald Trump ne prenne pas en compte ces aspects-là, même si ce sont des défis colossaux. D'autant que la migration aura aussi un impact sur l'économie américaine, il ne faut pas oublier que tous ces braves gens travaillent!"
Q : Plus largement, quel sera l'impact économique, pour Mexico, de l'arrivée de Donald Trump et de sa volonté de taxer fortement les entreprises américaines qui délocalisent au Mexique ?
R : "Depuis des années, le modèle de développement du Mexique reposait sur un arrimage de son économie aux Etats-Unis, en privilégiant cette relation au marché intérieur (américain), par des bas salaires qui ont permis d'augmenter la compétitivité du pays. Le meilleur exemple, c'est l'industrie automobile, qui est au coeur du message de Trump. C'est ce modèle-là qu'il entend casser pour faire revenir les emplois qui sont au Mexique, vers les Etats-Unis. Aujourd'hui, on voit bien les limites du modèle économique mexicain."
Q : Comment va réagir le gouvernement mexicain ?
R : "On a l'impression que le gouvernement d'Enrique Peña Nieto n'a pas pris la mesure de ce qui l'attend dans les prochains mois. La question est grave. Le Mexique est un pays qui prélève peu d'impôt, la baisse du prix du baril a fait chuter les ressources de l'Etat et le gouvernement a du mal a financer la dette... Ses fondamentaux économiques commencent sérieusement à prendre l'eau. Avec la hausse du prix de l'essence, on a vu que lorsque le gouvernement essaye de trouver des alternatives, ça ne plaît pas. On voit mal comment le gouvernement pourrait serrer la vis davantage au niveau des prélèvements. Aujourd'hui, la stratégie du gouvernement mexicain pour apporter une réponse à ce problème n'est pas très claire."