Le commerce automobile redémarre sur les chapeaux de roue

Après plusieurs mois catastrophiques, le commerce automobile redémarre à pleine vitesse en France, grâce au déconfinement et aux primes à l'achat annoncées par le gouvernement, mais la filière reste inquiète pour l'avenir.

"Cela repart très, très, très fort, que ce soit sur le véhicule neuf ou le véhicule d'occasion", constate Quentin Barbier, chef des ventes dans la concession Hyundai de Chambourcy (Yvelines). "Il y a plus de monde qu'en temps normal, c'est impressionnant", se réjouit-il.

La marque coréenne indique avoir battu son record de commandes en France sur la première semaine de juin, dont 40% pour des véhicules électrifiés (hybrides, hybrides rechargeables ou 100% électriques).

La bonne dynamique est générale.

Chez Renault, on note aussi "une forte reprise de l'activité" commerciale.

La marque haut de gamme BMW enregistre depuis le début du mois "des prises de commandes supérieures à l'année dernière". Pour Vincent Salimon, patron de la filiale française du constructeur allemand, "la crise sanitaire renforce l'usage de la voiture car beaucoup de gens hésitent à prendre les transports en commun".

En outre, de nombreux Français qui passent habituellement leurs vacances à l'étranger vont rester dans l'Hexagone cet été. "On a beaucoup de prospects qui investissent dans une voiture pour partir en vacances", constate encore M. Salimon.

Les immatriculations de voitures neuves se sont effondrées avec la paralysie du commerce provoquée par la pandémie de coronavirus: -72% en mars, -90% en avril, puis -50% en mai avec un déconfinement qui a permis de sauver la fin du mois.

La première semaine de juin affiche encore un recul de 30% sur un an, malgré un doublement des volumes de véhicules électrifiés, selon des chiffres de AAA Data compilés par l'AFP. Mais les bonnes prises de commandes se refléteront dans les livraisons des prochaines semaines.

 

Un feu de paille ?

Le renforcement des bonus écologiques et primes à la casse, annoncé le 26 mai par le président Emmanuel Macron, "fonctionne", se félicite Francis Bartholomé, président du Conseil national des professions de l'automobile (CNPA). "Les résultats sont au maximum de ce qu'on pouvait espérer. Il y a du trafic dans les concessions, cela concerne tous les territoires et toutes les marques", a-t-il déclaré à l'AFP.

Sur la base des dix premiers jours, juin 2020 sera équivalent à juin 2018 et juin 2019 en prises de commandes, estime M. Bartholomé. Il y a quelques semaines, "si on nous avait dit cela, on aurait signé tout de suite".

"On espère que ça va durer. On n'a pas de certitude mais on pense que oui", confie M. Salimon. Il souligne que la forte reprise de l'automobile en Chine, premier foyer de la pandémie de Covid-19 mais aussi premier pays à se redresser, est en train de durer. En outre, le renforcement des bonus écologiques pour l'achat de véhicules électrifiés sera en oeuvre jusqu'à fin décembre et devrait continuer de porter le marché.

"On voit bien qu'il y a une frénésie de consommation", avec le retour de clients frustrés de ne pas avoir pu commander pendant deux mois mais aussi des clients qui anticipent leur achat, attirés par les bonnes affaires, explique François Roudier, porte-parole du Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA). Mais "c'est peut-être du court terme", tempère-t-il.

Le retard accumulé au printemps ne sera pas rattrapé, avertit le CCFA qui prévoit une chute des immatriculations "entre -20% et -30%" sur l'année complète.

Ces inquiétudes sont appuyées par les baromètres d'opinion. Fin mai, près de 40% des personnes ayant un projet d'achat automobile déclaraient vouloir le repousser d'un an, selon Nova Consulting. "C'est un niveau inédit" même si le taux a baissé de 20 points depuis fin mars, a indiqué à l'AFP le directeur général Nicolas Harlé. Selon lui, "la bataille de la reprise de l'automobile n'est pas encore gagnée".

"Oui, nous avons une augmentation sensible de la fréquentation, mais je me garderais bien de dire que tout est rose", explique aussi Jean-Patrice Bernard, patron du groupe Bernard, qui compte 102 points de vente en France. Certes les stocks se vident et le cash revient, mais la crise a laissé "un trou financier significatif".

aro/ak/nth

© 2020AFP