L'action Mitsubishi poursuit sa descente aux enfers

L'action du constructeur japonais d'automobiles Mitsubishi Motors, aux prises avec un scandale de fraude, a plongé de plus de 13% vendredi à la Bourse de Tokyo où elle a perdu plus de 40% en trois jours.

L'agence de notation financière Standard & Poor's (S&P) a placé sous surveillance négative la note de la dette à long terme du groupe, actuellement à "BB+", menaçant de la dégrader dans un avenir proche.

Cette affaire de falsification de données "va probablement se traduire par un déclin des ventes", a expliqué l'agence qui s'attend à "une dégradation de la performance commerciale et du profil financier de la compagnie au cours des deux prochaines années".

Le titre a affiché un recul de 79 yens (-13,55%) à l'issue des échanges, à 504 yens. Il avait lâché 15% mercredi et 20% jeudi, une série négative d'une ampleur inédite depuis l'introduction en Bourse du groupe en 1988, selon l'agence Bloomberg.

Près de 3 milliards d'euros de capitalisation boursière se sont envolés depuis mercredi, quand sont apparues les premières informations.

Mitsubishi Motors Corporation (MMC) a avoué avoir manipulé des tests pour améliorer les performances énergétiques de quatre modèles de véhicules vendus au Japon. Pour l'heure, 625.000 mini-voitures sont concernées, mais d'autres modèles, commercialisés à l'étranger, pourraient être touchés.

Le ministère des Transports a poursuivi vendredi ses perquisitions dans un Centre technique du constructeur japonais dans la préfecture d'Aichi (centre), a indiqué un fonctionnaire à l'AFP.

"Je ne peux pas m'empêcher d'avoir des doutes sur l'attitude de la compagnie s'agissant du respect de la loi, c'est extrêmement regrettable", a déclaré le ministre Keiichi Ishii à la presse, en référence à un précédent scandale de camouflage des défauts au début des années 2000.

Les autorités envisagent par ailleurs de revoir les méthodes de tests afin de regagner la "confiance" des consommateurs.

 

'Fardeau financier'

Parmi les automobiles en cause, les trois quarts étaient fabriquées pour son compatriote Nissan, dont le titre n'a pas été affecté (+1,71% à 1.066 yens). C'est d'ailleurs lui qui a découvert les divergences entre les mesures constatées et celles fournies.

A l'image du cas Volkswagen, "les dommages seront importants", a averti le patron de Mitsubishi Motors, Tetsuro Aikawa. Outre l'inévitable impact sur sa réputation, la société japonaise se prépare à subir des coûts conséquents: elle devra probablement verser des compensations financières à ses clients ainsi qu'à Nissan, des indemnités à d'éventuels plaignants et s'expose aussi à des pénalités de la part du gouvernement.

"Il se peut que nous abaissions notre appréciation si la trésorerie de la compagnie diminue significativement et si elle peine à se redresser rapidement", du fait de "la fragilisation de son image ou d'un fardeau financier trop lourd", a prévenu S&P. L'agence de notation jugera aussi la capacité du constructeur à "mettre en oeuvre des mesures pour éviter que le scénario se répète et réformer sa gouvernance".

Mitsubishi Motors risque en outre de perdre le contrat avec Nissan, prévient Christopher Richter, analyste automobile de la société de courtage CLSA à Tokyo. "C'est un coup dur pour le groupe, dont la grande majorité des activités au Japon se résume à la vente de véhicules à des tiers depuis le scandale des années 2000 qui a réduit sa part de marché à des miettes" (2,1%), a-t-il souligné.

MMC venait de solder les dernières traces dans ses finances de cette affaire, dont il s'est relevé grâce à l'intervention des autres entreprises de la galaxie Mitsubishi.

Petit poucet comparé aux géants Toyota et Nissan avec seulement un million de véhicules écoulés par an dans le monde, le constructeur "pourrait vendre des actifs" pour se redresser. "Il y a déjà eu des discussions de restructuration ou de consolidation par le passé, mais la résistance était forte au sein de la constellation Mitsubishi", rappelle cependant M. Richter.

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