La Formule E, un laboratoire pour les constructeurs de véhicules électriques

La Formule E, dont le championnat 2018/2019 a connu son dénouement à New York ce weekend, attire de plus en plus de constructeurs en quête d'un laboratoire mais aussi d'une vitrine pour leurs véhicules électriques.

Le Japonais Nissan, le Français DS, les Allemands BMW et Audi, les Indiens Mahindra et Tata (ce dernier avec sa marque Jaguar), le Chinois NIO, vont être rejoints l'an prochain par Mercedes et Porsche alors que Honda exprime aussi son intérêt.

"Pour une marque comme DS qui veut avoir d'ici 5 ans une gamme toute électrifiée, on a cherché une discipline d'avant-garde", souligne Xavier Mestelan Pinon, directeur de DS Performance. Associée à l'écurie chinoise Techeetah, le constructeur français vise ce weekend à conquérir un premier titre équipe et un deuxième titre pilote avec le Français Jean-Eric Vergne.

"Les courses ont lieu dans les villes, là où on vend des voitures, et c'est surtout un accélérateur de Recherche et Développement pour améliorer rapidement les niveaux technologiques de nos ingénieurs", ajoute-t-il. Le développement des véhicules électriques est actuellement ultra-rapide "et les solutions qui seront utilisées dans deux ans, nous ne les connaissons parfois pas encore".

"Dans le cas de la Formule E, l'autonomie a doublé depuis le lancement du championnat (en 2014, ndlr) et la puissance a augmenté d'un tiers, le poids restant par ailleurs le même" autour de 900 kilos, rappelle l'ingénieur qui, avant de se consacrer à cette discipline, a aussi dirigé le programme de Citroën en rallye.

 

Charge rapide

Les promoteurs du championnat de Formule E, qui ne veulent pas se faire eux-mêmes doubler par ces progrès, ont repoussé d'un an l'introduction des monoplaces de 3e Génération, soit à la saison 2022/2023.

Celles de la 2e Génération actuelle ont apporté comme principale innovation l'abandon des changements de voitures en milieu de course, celles-ci durant désormais 45 minutes plus un tour.

"Le développement de ces voitures coûte très cher et chaque nouvelle voiture doit être l'occasion de mettre en avant un élément fort pour le grand public. Celui de la Génération 2 c'était de dire +nos voitures ont doublé d'autonomie+. Pour la Génération 3 on cherche à proposer quelque chose de fort comme la charge rapide. Mais on s'aperçoit que c'est très en avance et qu'il faut encore trouver les technologies pour le faire et on s'est donné un an de plus pour prendre les bonnes décisions", indique Xavier Mestelan Pinon.

Il reste d'ailleurs mitigé sur l'opportunité de voir les monoplaces électriques s'arrêter quelques dizaines de secondes au stand pour recharger peut-être seulement 10% de leur batterie.

"Je ne sais pas si cela sera très probant", estime l'ingénieur, "mais je me trompe peut-être".

 

Réinventer le sport auto

Un autre développement envisagé est de maximiser la recharge de la batterie par l'intermédiaire des périodes de freinage. "Cela implique des voitures à quatre roues motrices", que n'ont pas les actuelles monoplaces de 2e Génération. "Et cela veut dire qu'elles seront beaucoup plus collées par terre au détriment du spectacle", prévient-il, suggérant que la fonction 4x4 ne soit utilisée qu'en phase de freinage.

Le rôle de la Formule E dans la promotion des véhicules électriques ne se limite pas seulement à l'aspect technologique.

Le responsable de DS Performance juge que le "Attack Mode", qui permet à un pilote d'engranger un supplément de puissance en passant pendant la course dans une zone spécifique matérialisée par des flèches lumineuses comme dans un jeu vidéo, est une bonne chose.

"Il faut reconnaître que le sport automobile est moins la tasse de thé des jeunes générations. Nous cherchons à vendre une forme de nouvelle mobilité et nous devons nous y adapter en tant que constructeur. Rajeunir le sport automobile, c'est intéressant. Il faut essayer, changer le format des courses et l'idée de la Formule E c'est aussi de réinventer le sport automobile", déclare-t-il.

Il rappelle, à l'appui du succès de la discipline, que 160.000 spectateurs sont venus regarder l'ePrix de Berne il y a trois semaines et, parmi eux, beaucoup plus de femmes et d'enfants que pour une course de Formule 1.

© 2019AFP