Kobe Steel se sépare de son PDG

Cinq mois après la révélation d'un scandale de données falsifiées, le sidérurgiste japonais Kobe Steel a décidé de se séparer de son PDG pour tenter de restaurer la confiance, alors que de nouvelles irrégularités ont été découvertes.

"Je vais démissionner à compter du 1er avril", a déclaré mardi lors d'une conférence de presse Hiroya Kawasaki, 63 ans, en poste depuis 2013, tout en se prosternant sous les flashes des caméras, l'air contrit. Le nom de son successeur sera annoncé dans les prochains jours.

La mise en place d'une nouvelle direction permettra de "mettre en oeuvre promptement les réformes" afin d'éviter que de tels problèmes ne se reproduisent, a-t-il ajouté.

L'affaire, ternissant un peu plus la réputation de l'industrie japonaise après une série noire, avait éclaté début octobre. Le groupe avait alors expliqué que des salariés avaient enjolivé les propriétés techniques de produits ou fabriqué des données, afin de satisfaire aux exigences de leurs chefs, en quête de toujours plus de profits.

Le PDG cite "une culture d'entreprise qui a fait passer le nombre de commandes remportées et le respect des délais de livraison devant la qualité", et une faible mobilité interne qui a contribué à faire perdurer de tels agissements.

Au fil des jours, il s'est avéré que la fraude n'était pas limitée à une seule division, ni à la période récente.

 

Près de 700 victimes

"Nous prenons très au sérieux le fait que les mauvaises pratiques se sont déroulées en de nombreux endroits", a reconnu M. Kawasaki dans un communiqué, évoquant "des problèmes profondément ancrés" en termes d'organisation et de gouvernance.

Dans certains cas, les falsifications des données remontaient "aussi loin que les années 1970", a admis Kobe Steel, et certaines avaient fait l'objet d'indemnisations à l'amiable de clients en toute discrétion.

Kobe Steel avait jusqu'ici recensé 525 clients touchés, mais le comité d'enquête indépendant qui a été mis en place a "détecté de nouveaux cas" au nombre de 163, portant à près de 700 le nombre de clients victimes de la fraude.

Parmi eux, figurent les constructeurs d'automobiles nippons Toyota, Honda et Mazda, ou encore l'américain General Motors. Des groupes aéronautiques, comme Boeing, et de défense sont aussi sur la liste, et le département américain de la Justice s'est saisi du dossier.

"Depuis plus de 112 ans, Kobe Steel a mené ses activités en conservant la confiance de ses clients, partenaires, actionnaires et autres parties. La perte d'une telle confiance est profondément regrettable", a affirmé le PDG du troisième sidérurgiste japonais, fondé en 1905.

Autre départ annoncé, celui d'Akira Kaneko, chargé de la division aluminium et cuivre où des responsables exécutifs ont été impliqués dans les malversations. Plusieurs responsables vont en outre renoncer à une partie de leurs salaires.

Outre ces sanctions, une batterie de réformes vont être mises en oeuvre, en particulier une refonte du conseil d'administration, dont au moins un tiers des membres seront désormais issus de l'extérieur.

 

'Aucun problème de sûreté'

Pour l'heure, Kobe Steel a chiffré à 10 milliards de yens (environ 77 millions d'euros) l'impact du scandale, selon l'agence Bloomberg News, mais sa bonne performance opérationnelle lui a permis de résister.

Début février, l'entreprise a même relevé ses prévisions annuelles, mentionnant "une demande solide", en particulier du secteur automobile. Elle anticipe un retour aux bénéfices en 2017/18, avec un bénéfice net de 45 milliards de yens (346 millions d'euros), pour des ventes de 1.890 milliards de yens.

Après avoir procédé à des vérifications, "nous n'avons identifié aucun problème de sûreté qui obligerait les clients ou nous-mêmes à cesser d'utiliser ou à rappeler les produits immédiatement", avait alors souligné Kobe Steel.

A la Bourse de Tokyo, l'action avait dévissé de plus de 40% dans la semaine qui avait suivi les révélations. Elle s'est depuis redressée, limitant son recul à 19%.

Ces dernières années, la Japan Inc a été éclaboussée par toute une série de défaillances de contrôle qualité et de gouvernance.

L'automobile a connu son lot de scandales, avec Takata et ses airbags, Mitsubishi Motors, Nissan ou encore Subaru. Il y a aussi eu les cas Mitsubishi Materials et Toray. Sans oublier les péripéties du conglomérat industriel Toshiba, contraint à des restructurations douloureuses pour survivre.

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