Face à la concurrence de plus en plus féroce des entreprises chinoises largement subventionnées et des géants américains qui ont pris une longueur d'avance dans le numérique, la Commission européenne a promis de réagir.
"Nous ne sommes pas naïfs face à la concurrence parfois déloyale à laquelle nous devons faire face", a prévenu lundi la présidente de l'exécutif européen, l'Allemande Ursula von der Leyen, un jour avant la présentation de ce nouveau chantier.
Il s'agit pour l'instant de présenter une vision à long terme pour faire prospérer aussi bien les start-ups, que les PME et les leaders européens de demain, en identifiant de nouveaux outils. Mais il n'y aura pas encore de proposition législative mardi.
"Jusqu'à ce jour, c'était plutôt le consommateur européen qui a été mis en avant (...) Il faut désormais aller plus loin", remarquait récemment le Commissaire européen à l'Industrie Thierry Breton.
Et l'ancien ministre français de l'Economie et ex-PDG du groupe informatique Atos d'ajouter: "la politique industrielle en Europe ne peut plus être conduite avec pour seul but de réduire les prix pour le consommateur".
Bruxelles travaille sur deux axes principaux: actualiser les règles de la concurrence européenne et s'assurer que les règles concernant le commerce sont bien adaptées.
Réciprocité
Pour riposter aux assauts des mastodontes chinois fortement subventionnés qui viennent tailler des croupières aux entreprises européennes sur leur propre marché, la Commission réfléchit à de nouveaux instruments. Elle devrait publier fin juin un "livre blanc" avec des propositions d'actions censées ouvrir le débat.
Elle veut également insister sur le principe de réciprocité: comme le répète à l'envi la vice-présidente de la Commission européenne, la Danoise Margrethe Vestager, chargée de la Concurrence, on ne peut continuer à inviter quelqu'un indéfiniment, sans que ce dernier ne vous invite chez lui en retour.
En clair, les entreprises européennes doivent aussi pouvoir pénétrer le marché chinois et sans transfert de technologie obligatoire, comme c'est le cas actuellement.
Pour développer sa nouvelle stratégie industrielle, la Commission a retenu une vingtaine d'"écosystèmes" prioritaires (comme l'industrie automobile, l'aéronautique-espace, la construction durable...).
Chacun de ces écosystèmes sera composé de grandes entreprises du secteur, mais aussi de PME, de laboratoires de recherches et des universités.
"Chacun d'entre eux devra être compétitif dans son ensemble mais aussi avec sa dynamique propre et ses gouvernances", promet M. Breton.
"Mini-Airbus"
L'exécutif européen entend également favoriser le développement de projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC), des sortes de "mini-Airbus" dans un secteur bien précis, comme Paris et Berlin l'ont déjà fait avec les batteries de voitures électriques.
Pour voir le jour, ces projets pourront bénéficier d'une certaine flexibilité de la Commission européenne en matière d'aides d'Etat. Ces dernières doivent en effet toujours être autorisées par Bruxelles pour que soient maintenues des conditions de concurrence équitables pour toutes les entreprises.
Le prochain grand PIIEC doit se consacrer à l'énergie hydrogène, vital pour le secteur du transport, qui permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre, la pollution urbaine et la dépendance envers les carburants issus du pétrole.
Les règles européennes de la concurrence sur les fusions/acquisitions, qui avaient été fortement attaquées l'an passé par Paris et Berlin après l'interdiction par Bruxelles du mariage franco-allemand Alstom/Siemens, devraient également être actualisées.
En juin, la Commission devrait lancer une consultation auprès des acteurs concernés pour voir comment procéder. Il n'est toutefois pas question de créer de toute pièce des champions européens, comme l'avait réclamé le ministre français des Finances, Bruno Le Maire. "Un champion doit émerger d'une concurrence juste et équitable", avertit un responsable européen, qui ne veut pas de la création de mastodonte au détriment des plus petits.