Gruau fête ses 130 ans (+vidéo)

Quel est le point commun entre des camions de pompiers, des ambulances, des véhicules de police, des douanes ou des pompes funèbres ? l'entreprise familiale Gruau, basée à Laval, qui sort du bois cette année pour fêter ses 130 ans.

Méconnue du grand public, l'entreprise de 1.500 salariés, spécialisée dans le véhicule utilitaire, est pourtant présente aux yeux de tous, chaque jour, dans la rue. Créée en 1889 par René Le Godais, charron de profession, l'ancêtre du carrossier, elle est aujourd'hui détenue à 90% par Patrick Gruau, son arrière-arrière petit-fils, 63 ans, qui pourrait un jour à son tour la transmettre à son fils Guillaume, 34 ans.

"J'ai coutume de dire que des entreprises de plus de 100 ans, qui sont toujours dirigées par la même famille, c'est rare, qui plus est de notre taille et dans l'industrie automobile française", se réjouit Patrick Gruau, l'air bonhomme.

Car dans le secteur des "constructeurs carrossiers", Gruau, qui réalise 290 millions d'euros de chiffre d'affaires, est bien le seul à régner sur autant de marchés différents, en France comme en Europe. Son premier concurrent, l'Allemand Was, est lui spécialisé dans le secteur de l'ambulance. En France, ses concurrents s'appellent Durisotti, JPM, Vehixel ou Dauphins, mais ils réalisent tous moins de 60 millions d'euros de chiffre d'affaires et sont eux aussi souvent spécialisés dans un secteur, comme le camion benne.

Chaque année, Gruau, qui intervient en complément de 35 marques de constructeurs automobiles, transforme quelque 54.000 véhicules utilitaires selon les besoins des différents métiers. Sur ses lignes de production, les véhicules sont rallongés, les cloisons renforcées, l'intérieur électrifié et équipé selon les besoins.

Ainsi, un véhicule pénitentiaire sera-t-il doté de cellules, un véhicule pour personnes à mobilité réduite d'une rampe d'accès, un véhicule transportant du matériel médical de compartiments à différents degrés de température. Dernièrement, l'usine a même reçu la commande d'aménager des véhicules qui sillonneront les campagnes et les maisons de retraite pour contrôler la vision et l'audition de particuliers.

- ambulances connectées -

Si Gruau a commencé dans l'hippomobile au moment où la France inaugurait la Tour Eiffel, son fondateur proposait déjà des "transformations sur mesure" de charrettes pour ses clients, les paysans, et avait investi dans des machines outils ramenées de l'Exposition universelle de 1900.

La gamme des voitures hippomobiles s'est ensuite élargie, puis arrivent les minicars, cars scolaires et les véhicules magasins d'artisans bouchers, boulangers, siglés de diverses marques. Le virage vers la production industrielle se fera en 1955 avec la création d'un bureau d'études et l'obtention d'un marché de 250 cars pour l'armée de l'air, dont toutes les pièces ont été pour la première fois dessinées.

Depuis, le groupe s'est recentré sur les véhicules utilitaires et le marché des professionnels, même si pour l'anecdote, Patrick Gruau est allé livrer en personne un véhicule électrique à Rome pour l'ancien pape Benoît XVI afin de lui permettre de circuler plus aisément dans les 55 hectares de sa résidence de Castel Gandolfo.

Principal fournisseur des véhicules des forces de l'ordre et des pompiers, Gruau réalise 80% de son chiffre d'affaires en France et a beaucoup grossi depuis 35 ans du fait d'opérations de croissance externe. D'ici 2022, il s'est donné pour objectif de réaliser 40% de son chiffre d'affaires à l'étranger.

"Si nous restons uniquement sur le marché français, ce sera difficile de concourir face à des acteurs étrangers qui pourraient arriver d'ici quelques années sur le marché français", estime Guillaume Gruau.

Parallèlement, le groupe continue à inventer de nouveaux équipements pour ses clients: ambulances connectées réapprovisionnées après chaque passage à l'hôpital en fonction des besoins, véhicule autonome transportant des colis et capable de suivre les facteurs pendant leur tournée, ou encore caissons sur les toits des véhicules de police transportant drones et caméras pour détecter, entre autres, des véhicules volés... Et demain, ce sont les ambulances qui communiqueront avec les feux rouges, prédit-on chez Gruau.

© 2019AFP