Fusion Renault/FCA: désaccord sur les termes financiers

Le constructeur italo-américain Fiat-Chrysler (FCA) et son concurrent Renault sont en désaccord sur les termes financiers de la fusion envisagée, dont les négociations sont bloquées, affirme jeudi le site internet des Echos, citant des sources dans "l'entourage" de FCA. Parallèlement, Renault continue à vouloir rassurer Nissan sur l'intérêt d'une telle opération pour l'Alliance comme pour le constructeur japonais.

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Du côté de la firme au losange, "plusieurs administrateurs estiment nécessaire de revoir les conditions financières proposées par les Agnelli, par exemple sous la forme d'une prime", selon Les Echos, ce à quoi une source dans l'entourage du constructeur turinois, citée par le quotidien, rétorque que "L'offre de FCA n'est pas négociable".

"Cette proposition semble équitable, elle a été approuvée par le conseil d'administration. C'est à prendre ou à laisser, et rapidement !", ajoute cette source.

"FCA s'est basé sur les cours de Bourse du 24 mai dernier, dernière cotation avant l'annonce : or pour Renault, le cours correspondant (51,70 euros) est un plus bas depuis plus de cinq ans. Jusqu'à l'arrestation spectaculaire de Carlos Ghosn en novembre, il n'était que rarement tombé sous les 70 euros", relèvent Les Echos, pour expliquer pourquoi les Français se sentent lésés à ce stade.

"La proposition est équilibrée à la fois en termes de valorisation, et en termes de gouvernance, et sur le plan industriel", s'est bornée à indiquer à l'AFP une source dans l'entourage du constructeur italo-américain.

Du côté de Renault, on accueille cette déclaration avec prudence. "Tant que le conseil d'administration n'a pas fait part de sa position, c'est compliqué de commenter des rumeurs", a réagi une source proche du constructeur français.

Une autre source proche du dossier estime que dans ce genre d'affaire ce n'est jamais à prendre ou à laisser. "Ce type de proposition est forcément négociable", indique cette personne bien informée des discussions en cours.

 

Nissan encore à convaincre

Cette information arrive alors que les dirigeants de Renault ont tenté mercredi de rassurer leur partenaire japonais Nissan sur le projet de mariage du groupe français avec le constructeur italo-américain Fiat Chrysler (FCA) qui, s'il aboutit, bouleversera les équilibres de l'alliance.

Ils se sont rencontrés à l'occasion d'un conseil opérationnel au siège de Nissan à Yokohama (banlieue de Tokyo), en présence de responsables du troisième membre de l'ensemble, Mitsubishi Motors.

"Une fusion avec Nissan n'est pas à notre agenda pendant que nous menons notre fusion avec FCA", affirme Jean-Dominique Senard dans une déclaration transmise aux médias à l'issue d'un séjour au Japon pour un conseil opérationnel de l'Alliance.

Cependant, "si le conseil d'administration de Nissan juge bon d'explorer une relation plus proche au moment de leur choix, nous sommes définitivement ouvert à l'idée", souligne-t-il.

Après avoir été éconduit par Nissan, soucieux de préserver son indépendance, Renault a décidé de s'unir à Fiat Chrysler, un mariage dit "entre égaux": la nouvelle entité serait détenue à 50% par les actionnaires du constructeur italo-américain et à 50% par ceux de Renault et serait cotée à Paris, New York et Milan.

L'annonce a pris de court le groupe japonais qui aborde "avec prudence" le dossier, selon une source proche du dossier.

M. Senard, présent cette semaine à Tokyo avec le directeur général de Renault, Thierry Bolloré, a tenté de rassurer son allié de 20 ans au cours d'une réunion de quelques heures mercredi.

Au début des discussions, "la partie japonaise était naturellement un peu sceptique, mais ensuite elle a montré une attitude positive", a assuré le président de Renault dans un entretien au quotidien économique Nikkei.

M. Senard ajouté qu'il "ne s'opposerait" à la nomination d'aucun des membres du nouveau conseil d'administration de Nissan, lors de l'assemblée générale des actionnaires prévue fin juin. Parmi les 11 candidats, figure l'actuel patron exécutif Hiroto Saikawa, critiqué pour sa gestion de l'affaire Ghosn mais qui veut rester à son poste pour préparer la succession.

 

Nissan dans le flou

L'opération pose de nombreuses questions sur l'avenir de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi Motors, née en 1999 et fragilisée par l'éviction de son bâtisseur Carlos Ghosn, à la suite de son arrestation en novembre au Japon pour soupçons de malversations financières.

"Nous pensons que les bénéfices (...) s'étendront aussi aux partenaires de l'Alliance, Mitsubishi et Nissan", a estimé le patron de FCA, Mike Manley.

En comptant Nissan et Mitsubishi, la fusion créerait un ensemble de près de 16 millions de véhicules - loin devant le colosse allemand Volkswagen (10,6 millions) et Toyota (10,59 millions)- qui serait en position de force pour aborder les mutations de l'industrie automobile (électrification, conduite autonome, véhicules connectés...).

Chez Nissan, qui s'interroge sur ce que serait sa place dans ce nouvel attelage, l'annonce a été initialement accueillie avec réserve, voire scepticisme pour certains, alors que le constructeur japonais venait de rejeter une offre de rapprochement avec Renault pour se concentrer sur son redressement.

Face à la presse, son patron Hiroto Saikawa s'est dit plutôt ouvert à l'idée, jugeant qu'une extension du partenariat actuel pouvait être positive. "Mais je veux regarder de près le projet en ayant à coeur les intérêts de Nissan", a-t-il souligné avant la réunion, selon des propos rapportés par les médias locaux.

Il s'agissait du deuxième conseil opérationnel de l'alliance, une structure créée en mars pour tenter de prendre un nouveau départ après les tumultes causés par le scandale Ghosn. Il s'était réuni une première fois le 12 avril à Paris.

Cette gouvernance collégiale est composée, en plus de MM. Senard et Saikawa, du directeur général exécutif de Renault, Thierry Bolloré, et du PDG de Mitsubishi Motors, Osamu Masuko.

Renault détient 43% de Nissan qui en retour possède 15% de Renault, mais sans droit de vote, et 34% de Mitsubishi Motors.

Par ailleurs, devant les critiques, M. Saikawa, ancien fidèle de M. Ghosn qui a tourné casaque, a récemment annoncé aux investisseurs qu'il allait réduire de moitié sa rémunération cette année pour n'avoir pas su empêcher les malversations financières présumées que le groupe reproche aujourd'hui au magnat de l'automobile déchu.

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