Etats-Unis : normes de pollution auto durcies, l'électrique promu

Le gouvernement américain a proposé mercredi des normes plus strictes sur les émissions polluantes des automobiles, espérant ainsi inciter les constructeurs à intégrer dans leurs ventes deux tiers de voitures électriques d'ici 2032.

Cet objectif va au-delà des ambitions dévoilées il y a deux ans par le président Joe Biden de faire en sorte que la moitié des voitures vendues aux Etats-Unis en 2030 soient sans émissions (électriques, à hydrogène) ou à faibles émissions (hybrides rechargeables).

Cette fois-ci, l'administration ne fixe pas un quota précis de véhicules propres à vendre.

Mais l'agence de protection de l'environnement (EPA) prévoit de restreindre progressivement la quantité moyenne d'émissions polluantes des nouveaux véhicules produits par chaque constructeur, les incitant au passage à électrifier de plus en plus leur flotte.

Ces nouvelles normes, désormais objet d'une consultation publique, devraient permettre d'éviter près de 10 milliards de tonnes d'émissions de CO2 d'ici 2055, soit plus du double des émissions aux Etats-Unis en 2022, estime l'EPA.

Elles "nous aideront à respecter nos engagements internationaux en matière de lutte contre la crise climatique tout en améliorant la qualité de l'air dans l'ensemble du pays", a souligné le patron de l'agence, Michael Reagan, lors d'une conférence de presse.

C'est "une pièce maîtresse du puzzle visant à réduire la plus grande source de pollution au carbone de notre pays", estime Manish Bapna, à la tête de l'organisation environnementale NRDC, dans une déclaration transmise à l'AFP.

"Si elles sont bien appliquées", ces mesures permettront par ailleurs de réduire les importations de pétrole et les dépenses en carburants des automobilistes, ajoute-t-il.

 

Défis à surmonter

Il reviendra aux constructeurs de choisir quelles technologies ils adoptent pour réduire leurs émissions.

Par le passé, ils ont pu alléger leurs véhicules ou améliorer l'efficacité de leur moteur. Ils pourraient adopter de nouveaux filtres à particules.

Mais dans la mesure où nombre de constructeurs sont désormais bien engagés dans l'électrification, l'agence mise surtout sur une accélération de ce mouvement: selon ses calculs, avec les nouvelles normes, les électriques pourraient atteindre 67% des ventes de véhicules légers (citadines, berlines, SUV, pick-up) en 2032, 50% des ventes de bus et camions poubelles, 35% des camions de transport de proximité et 25% des camions de transport longue distance.

La pente est raide pour les constructeurs: même si leurs ventes ont beaucoup augmenté ces deux dernières années, les voitures tout électrique ne représentaient que 5,8% des véhicules écoulés aux Etats-Unis en 2022, selon le cabinet Cox Automotive.

Il faut compter sur les avancées technologiques, a remarqué Ali Zaidi, conseiller climat à la Maison Blanche, lors d'un point presse.

Par ailleurs, en plus des nombreuses aides publiques destinées à favoriser l'émergence de la voiture électrique depuis l'arrivée de M. Biden à la présidence, le secteur privé a investi 120 milliards de dollars dans la fabrication de véhicules et de batteries électriques, a-t-il fait valoir: il suffit d'observer "ce qui se construit et à quelle vitesse".

Pour Arthur Wheaton, spécialiste du secteur automobile à l'université Cornell, ces ambitions se heurtent toutefois à plusieurs défis, le premier étant politique: les normes peuvent changer à chaque nouveau président, ce qui rend "très difficile toute stratégie à long terme" pour les entreprises.

Les constructeurs continuent par ailleurs à faire face à des problèmes dans leur chaîne d'approvisionnement.

Les start-up Rivian et Lucid par exemple ne parviennent pas à atteindre leurs objectifs de production.

Et pour les mastodontes du secteur, transformer tout un système de production depuis la construction d'usines de batteries à la modification des chaînes d'assemblage, prend du temps. Les voitures électriques ne représentent encore qu'une petite partie des ventes de General Motors et Ford - et leur coûtent beaucoup d'argent.

Les constructeurs doivent également gérer "la disponibilité limitée des matières premières" comme le lithium, remarque M. Wheaton en évoquant aussi la nécessité de moderniser, et verdir, le réseau électrique et d'installer plus de bornes de recharge.

"La question n'est pas de savoir si les objectifs (de l'EPA) peuvent être atteints mais à quelle vitesse", a souligné dans un communiqué John Bozzellale, président de l'Alliance pour l'innovation automobile, qui représente les constructeurs. Cela dépendra "des mesures prises par le gouvernement et des conditions du marché automobile", a-t-il relevé.

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