Des milliers de motards contre le Contrôle Technique

Harley Davidson grondantes, sportives japonaises rugissantes, Vespa pétaradantes... et un Solex, hoquetant : dimanche, des milliers de motards ont défilé dans Paris contre le contrôle technique obligatoire des deux-roues à la revente, prévu par le gouvernement pour 2017.

L'esplanade du château de Vincennes, point de départ de la manifestation, est noire de monde en début d'après-midi. Beaucoup de gros cubes, quelques petites cylindrées, et des dizaines de badauds profitant de l'ambiance bon enfant et du rugissement des moteurs.

Sur presque tous les deux-roues, des autocollants, sur lesquels on peut lire : "Stop au contrôle technique des motos", "je contrôle, tu contrôles, ils s'enrichissent", ou encore "Touche pas à ma liberté".

Après une cinquantaine de manifestations similaires partout en France samedi, la grogne des motards s'est invitée dimanche dans la capitale, rassemblant 10.000 personnes selon les organisateurs, 4.000 participants pour un total de 3.200 à 3.400 deux-roues selon une source policière.

A la manoeuvre, la Fédération des motards en colère (FFMC) et la Fédération française de motocyclisme dénoncent une mesure qui obligera une personne à effectuer un contrôle technique avant de revendre un deux (ou trois) -roues de plus de deux ans.

"C'est un mensonge avéré et objectif" du gouvernement, qui par ce biais "veut faire croire qu'il agit" contre l'insécurité routière, peste le délégué général de la FFMC, Nathanël Gagnaire.

Or les défaillances techniques sont la cause unique et directe de seulement 0,3% des accidents de deux-roues, argumente-t-il, évoquant une étude menée dans cinq pays européens. La Belgique, qui avait instauré le contrôle technique pour les motos, l'a retiré faute d'efficacité, insiste-t-il.

Et Nathanaël Gagnaire de trancher, lapidaire : "c'est une arnaque, ni plus ni moins."

Sur sa grosse Triumph ornée d'un drapeau britannique, David Blanc, un ingénieur de 33 ans, en est convaincu: "l'Etat en a clairement après les motards". "Pour moi, c'est clair, c'est motard égal pigeon".

"On nous parle de sécurité routière mais les glissières sur les autoroutes, à partir de 20 km/h c'est un hachoir pour les motards. Ça fait 20 ans qu'on le dit et pourtant elles sont toujours là", tonne-t-il.

 

'Evidence'

Avec 768 morts en 2015, les deux-roues motorisés (cyclomoteurs, scooters, motos), qui ne constituent "que 2% du trafic", représentent "22% des tués sur les routes" et 43% des blessés graves, soulignait en début de semaine le délégué interministériel Emmanuel Barbe.

Le contrôle technique, "instauré en 1992 pour les voitures, alors qu'elles ont quatre roues et une carrosserie", relève donc selon lui de l'"évidence" pour les deux-roues.

Dans le cortège, les motards préfèrent insister sur le fait qu'ils sont "les bons élèves de la sécurité routière" , avec une baisse de 1% de leur mortalité routière 2015, quand tous les autres usagers voient ce chiffre augmenter.

Philippe Guérin, vendeur de motos de 56 ans, reconnaît pourtant être parfois confronté à des cercueils roulants. "On voit des motos accidentées qui roulent encore, avec des fourches endommagées. Des gens qui n'ont pas d'argent roulent avec des pneus lisses. Surtout des scooters", raconte-t-il.

Mais plutôt qu'un contrôle technique systématique, il préfère une démarche de "sensibilisation" des propriétaires. Sa compagne Caroline est elle venue dénoncer "l'injustice" d'une décision de la mairie de Paris, qui interdira à partir du 1er juillet 2016 dans ses rues les voitures fabriquées avant 1997 et les deux-roues motorisés d'avant 2000, jugés trop polluants, entre 8H00 et 20H00.

"Soit on a le droit de rouler, soit non", peste Philippe Guérin, venu sur une Honda bientôt trentenaire, qui dénonce des "mesures à la con", sachant "qu'une vieille moto qui se faufile dans le trafic polluera toujours moins qu'une voiture roulant au diesel".

© 2016AFP