Pour ce groupe aux 40.000 employés répartis sur 13 sites, "les temps sont rudes", reconnaît le massif milliardaire de 51 ans, connu pour son franc parler, qui fait partie des hommes d'affaires réputés proches du Kremlin sanctionnés par Washington en avril 2018.
Depuis, le Trésor américain a retiré de sa liste noire la holding En+, le géant de l'aluminium Rusal, et Eurosibenegro au prix d'un désengagement de la part d'Oleg Deripaska. Mais pour GAZ, assembleur des légendaires modèles soviétiques Pobeda ou Volga et aujourd'hui surtout réputé pour ses solides fourgons Gazelle, un délai expirant début juillet a été accordé pour permettre aux partenaires de l'entreprise d'éviter de se trouver dans le collimateur de la justice américaine.
"Le 4 juillet est littéralement le dernier jour où cette usine pourra fonctionner", résume l'homme à la presse lors d'une visite de l'usine géante du groupe à Nijni-Novgorod, sur la Volga, devant les ouvriers de laquelle Vladimir Poutine avait annoncé fin 2017 sa candidature à la présidentielle.
D'ores et déjà, le constructeur est déjà "très affecté". "Travailler dans un environnement où l'on ne peut pas signer de nouveaux contrats ou se développer, bien sûr que c'est dur", affirme-t-il, soulignant que "l'usine a quand même réussi à survivre l'année dernière avec beaucoup de pertes".
Le coup est dur pour le groupe qui avait traversé une période difficile après la crise de 2008, surmontée grâce à un plan de redressement drastique sous la houlette d'un ancien dirigeant de General Motors. Mais aussi pour les partenaires occidentaux de GAZ, qui dispose de contrats de licence avec Volkswagen, Mercedes et Daimler, et qui utilise entre 30% et 40% de composants étrangers.
Avec ses alliés, l'entreprise russe avait investi 500 millions d'euros depuis 2012 pour se moderniser.
Washington silencieux
"Beaucoup de partenaires ont arrêté de travailler avec GAZ", indique M. Deripaska. Il cite Daimler qui a fermé sa ligne de production dans l'usine, où seulement trois autres lignes de production fonctionnent aujourd'hui. Il évoque également "une énorme pression des banques".
Pour sauver l'entreprise, il se dit prêt à renoncer au contrôle de GAZ, comme il l'a fait pour le géant de l'aluminium Rusal, et affirme l'avoir proposé aux autorités américaines, qui ne donnent "aucun signe": "Il n'y a pas de négociation. C'est le problème".
"Le problème est que cette entreprise est encore importante pour eux", pour "montrer du sang au Congrès" américain, avance-t-il.
Lui-même porté plainte en mars contre le Trésor américain et le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin, affirmant avoir perdu plus de 80% de sa fortune depuis le début des sanctions, soit 7,5 milliards de dollars.
"Le discours sur la Russie est bon à exploiter dans la politique intérieure et(les autorités américaines) l'utilisent au maximum", s'indigne-t-il. "En réalité la situation est simple. Ils ont commis une erreur avec l'aluminium et ils souffrent (...) ils ont fait un pas en arrière. Mais pour cette structure (GAZ), ils n'ont pas ce problème".
Pour appuyer sa cause, GAZ rappelle sa naissance en 1929, fruit d'un contrat signé avec l'américain Ford, pour la création d'une usine à Nijni-Novgorod. Depuis 1932, l'entreprise a produit plus de 18 millions de véhicules.
M. Deripaska espère voir ses chances renforcées par le rapport Mueller qui a conclu récemment à une volonté de Moscou d'influencer l'élection présidentielle américaine mais pas à une entente entre Donald Trump et la Russie.
"J'ai été puni uniquement parce que je suis un homme d'affaires russe, il n'y a pas d'autre explication", tempête Oleg Deripaska. "Vous prétendez vraiment que notre président va fléchir, quelles que soit les circonstances? C'est impossible. C'est une erreur mystérieuse des Etats-Unis de prendre le peuple russe en otage".
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