Coronavirus: Airbus suspend 4 jours sa production en France et en Espagne

Airbus a annoncé mardi la suspension de sa production en France et en Espagne pendant quatre jours et compte la reprendre lundi avec des "conditions strictes" permettant d'assurer la sécurité des salariés face à l'épidémie, une décision "pas raisonnable" selon les syndicats.

Dans ces deux pays, parmi les plus touchés par l'épidémie de coronavirus, les gouvernements ont décrété le confinement total de la population et n'autorisent les déplacements du domicile au lieu de travail que lorsque le télétravail n'est pas possible.

De nombreux mastodontes industriels, notamment dans le secteur automobile, ont déjà pris des mesures afin de limiter ou suspendre leur production pour des durées variables en fonction de l'évolution de l'épidémie.

Airbus lui, "a décidé de suspendre temporairement la production et les activités d'assemblage sur ses sites français et espagnols dans tout le groupe pour les quatre prochains jours", affirme le constructeur, qui fabrique dans ces deux pays des avions de ligne, aussi bien que des avions de transport militaire, des hélicoptères et des satellites.

"Cela laissera suffisamment de temps pour mettre en place" des mesures d'hygiène, de distanciation et de nettoyage permettant d'assurer la sécurité et la santé des salariés, ajoute-t-il, précisant par ailleurs qu'il "maximise le travail à domicile dans la mesure du possible".

Dans les immenses halls d'assemblage que compte le groupe à Toulouse pour les monocouloirs A320 et longs-courriers A330, A350 et A380 ou encore à Séville pour les avions de transport militaire, le travail est très automatisé et la densité de personnels est limitée par rapport à des usines automobiles.

Airbus emploie 48.000 salariés en France et 2.700 personnes en Espagne.

"Les quatre jours doivent permettre de s'assurer que dans le moindre site et bâtiment, on soit en conformité", plaide-t-on chez Airbus.

L'Espagne est le deuxième pays le plus touché d'Europe avec à ce stade 9.191 cas dont 309 morts, le France déplorant 6.633 cas et 148 morts.

Airbus indique que ces mesures seront "mises en oeuvre au niveau local en coordination avec les partenaires sociaux".

 

"Mesures radicales"

"On ne peut pas vouloir maîtriser la propagation du virus et continuer d'aller travailler. Il faut prendre des mesures radicales", a réagi pour l'AFP Jean-François Knepper, délégué syndical central Force ouvrière, premier syndicat dans l'entreprise.

"On a travaillé jusque tard dans la nuit avec notre direction (...) On comprend qu'elle essaie de prendre la meilleure décision pour l'entreprise, et ce n'est pas facile dans un contexte inédit", a-t-il ajouté.

Mais "notre revendication à FO, c'est que les gens ne reviennent pas travailler lundi", a-t-il affirmé, tout en se disant conscient "que des activités vitales pour le bon fonctionnement de l'entreprise doivent se poursuivre".

Même son de cloche à la CFE-CGC, deuxième syndicat chez Airbus: "on suit l'évolution de la situation, reprendre lundi cela ne semble pas raisonnable à ce stade", a déclaré à l'AFP Françoise Vallin, coordinatrice du syndicat.

Airbus a par ailleurs indiqué qu'il travaillait "avec ses clients et ses fournisseurs pour minimiser l'impact de cette décision sur les opérations".

Il doit notamment profiter des prochains jours pour s'adapter aux mesures de fermetures de frontières décrétées en Europe, même si les marchandises ne sont pas concernées, "afin d'assurer la chaîne d'approvisionnement", selon le ministre de l'Intérieur espagnol, Fernando Grande-Marlaska.

Airbus a notamment recours à ses propres avions Beluga pour transporter tronçons de fuselage et ailes des longs-courriers entre ses différents sites de production ainsi que de bateaux pour acheminer les composants d'avions (tronçons de fuselage, ailes) entre ses différents sites européens et vers l'usine de Mobile aux Etats-Unis.

Si le groupe s'attend à des reports de livraisons demandés par des compagnies aériennes durement touchées par la baisse du trafic aérien provoquée par la pandémie, il comptait à fin février un carnet de commandes de 7.670 avions, dont 6.209 de la famille A320, soit plus de huit ans de production aux cadences actuelles. A la fin 2019, il disposait d'une solide trésorerie de 12,5 milliards d'euros.

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