Allemagne: pas d'incarcération possible pour pollution de l'air

L'avocat général de la Cour de justice de l'UE a estimé jeudi que le recours à une peine d'emprisonnement n'était pas envisageable pour les responsables publics bavarois qui n'ont pas pris de mesure pour assainir la qualité de l'air.

La Cour de justice de l'UE (CJUE) est appelée à se prononcer sur l'opportunité de condamner à de la prison des responsables publics en Bavière afin de les contraindre à respecter une décision de justice qui les enjoint à prévoir des interdictions de circulation pour les véhicules à moteurs diesel à Munich.

Cette affaire est emblématique du non respect des normes de qualité de l'air en Allemagne.

Les conclusions de l'avocat général n'engagent pas la Cour, qui rendra son arrêt ultérieurement, mais elles sont souvent suivies.

L'imposition d'astreintes financières dans ce cas n'est pas coercitive, car le paiement des amendes reviendrait de facto dans les caisses du Land de Bavière, et n'entraînerait donc pas de perte pour l'administration.

Le tribunal administratif de Bavière s'interroge donc sur l'opportunité d'infliger des peines d'emprisonnement pour s'assurer de l'application de la décision de justice, et a sollicité un jugement de la CJUE.

L'affaire remonte à une requête déposée en 2012 par une ONG environnementale allemande, Deutsche Umwelthilfe (DUH), bête noire de l'industrie automobile.

Le gouvernement ayant refusé de prendre des mesures contre la pollution comme le lui imposait un jugement de la justice bavaroise, il a été condamné à une amende de 4.000 euros en 2014 pour manquement à ses obligations en matière de respect de la qualité de l'air.

Selon l'avocat général Henrik Sugmandsgaard Oe, "le droit fondamental à la liberté ne peut être limité que sur le fondement d'une loi qui prévoit clairement une telle possibilité à l'égard de ces responsables", explique un communiqué de la Cour. Or, une telle loi ne semble pas exister en Allemagne à l'égard des responsables publics, argumente l'avocat général.

"C'est au législateur national, s'il le souhaite, qu'il appartient de prévoir une telle loi", note l'avocat général.

Il souligne par ailleurs qu'il existe au niveau européen des moyens de coercition, à savoir la procédure en manquement, qui peut aboutir à des sanctions financières pour un Etat membre. C'est d'ailleurs le cas actuellement: la Commission a saisi la Cour de justice de l'UE sur la pollution de l'air en Allemagne, qui englobe notamment le cas de la ville de Munich.

Dans ses conclusions, l'avocat général ne manque pas d'observer que le refus des responsables publics bavarois de se conformer à une décision de justice "est susceptible d'entraîner des conséquences graves tant pour la santé et la vie des personnes que pour l'Etat de droit".

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