Agnès Pannier-Runacher: l'ex-Faurecia devient ministre déléguée

Énarque comme lui, haute fonctionnaire qui a alterné public et privé comme lui: Agnès Pannier-Runacher, promue lundi ministre déléguée à l'Industrie, est un soutien d'Emmanuel Macron de la première heure qui a fait ses premiers pas en politique à Bercy... comme le président.

Les comparaisons s'arrêtent là. Si Emmanuel Macron a été propulsé au ministère de l'Economie, cette inspectrice des Finances de 46 ans a été nommée en octobre 2018 à la fonction plus discrète de secrétaire d'Etat à l'Economie.

Elle restera chargée de l'Industrie dans le gouvernement du nouveau Premier ministre Jean Castex, mais avec le grade plus élevé de "ministre déléguée", et tout en restant sous l'égide de Bruno Le Maire, lui-même reconduit comme ministre de l'Economie, des finances... et de la relance.

C'est sur le bureau de Mme Pannier-Runacher qu'atterrissent les dossiers les plus épineux, doux euphémisme pour des fermetures d'usines et les conflits sociaux qui remontent jusqu'à Bercy.

De la recherche d'un repreneur pour l'aciérie de Saint-Saulve (Nord) au plan social annoncé récemment par Nokia, en passant par l'approvisionnement en masques pendant le confinement, cette Parisienne pur jus a eu l'occasion de faire le tour de la France qui se désindustrialise, au cours d'un mandat qui a débuté juste avant la crise des "gilets jaunes".

Pour ceux qui l'ont vue revenir en tennis à Bercy, où elle avait commencé sa carrière comme inspectrice des Finances de 2000 à 2003 après l'ENA (promotion Averroès 1998-2000), cette tenue décontractée ne correspondait pas à la détermination dont elle a fait preuve immédiatement.

"Elle s'est tout de suite montrée conquérante", explique une source à l'AFP, témoin de ses premiers pas au ministère. "Elle y est allée! Elle est courageuse et efficace", commente-t-on dans l'entourage de Bruno Le Maire, le ministre des Finances qui se félicite de "la confiance que l'on peut avoir en elle" pour gérer les dossiers difficiles.

Un avis que l'opposition ne partage pas, en particulier à gauche. "Elle est certainement compétente, mais il lui manque une fibre politique, de l'incarnation", commente un élu sous anonymat, qui lui reproche sa froideur dans la gestion des fermetures d'usines.

Adepte de la +start-up nation+, elle s'est aussi impliquée pour le +made in France+ en organisant une exposition à l'Elysée de produits français en janvier.

- Impliquée sur les retraites -

Mme Pannier-Runacher s'est surtout métamorphosée à la fin de l'année dernière lorsque le gouvernement a entrepris la réforme des retraites, provoquant de longues grèves.

Montant au front, la secrétaire d'Etat oublie alors son image de bonne élève des beaux quartiers qui lisait avec application des réponses rédigées par ses services devant les députés de l'Assemblée nationale.

Sur les plateaux de télévision, elle ne se contente pas de défendre le projet du gouvernement, allant au "clash" avec les syndicalistes de la CGT qui lui tiennent tête. Un positionnement politique qui l'a conduite à se présenter sur la liste LREM dans le très chic 16e arrondissement de Paris, mais sans succès.

Son expérience professionnelle lui a peut-être été utile lors de la gestion des masques pendant le confinement. "Si personne ne parle de ce sujet depuis le déconfinement, c'est la preuve qu'elle a fait du bon boulot", se félicite-t-on dans l'entourage de M. Le Maire.

Pendant le confinement, elle a ainsi retrouvé un domaine qu'elle connaissait depuis qu'elle avait exercé les fonctions de directrice de cabinet de la directrice générale de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) de 2003 à 2006, poste où elle était notamment chargée de la mise en place de la réforme de la tarification à l'activité.

Diplômée d'HEC et de Sciences Po, cette mère de trois enfants se distingue de ses collègues du gouvernement pour avoir longtemps travaillé dans le privé avant de rejoindre Bercy.

Elle a notamment exercé les fonctions de directrice adjointe des finances et de la stratégie du groupe Caisse des dépôts.

Elle est passée en 2011 chez l'équipementier automobile Faurecia comme "directrice de division clients", avant de devenir en janvier 2013 directrice générale déléguée de la Compagnie des Alpes, leader mondial de l'exploitation des domaines skiables.

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