-37,5% de CO2 d'ici à 2030: les constructeurs en colère

Les négociateurs des Etats membres de l'UE et du Parlement européen se sont mis d'accord pour réduire les émissions de CO2 des voitures neuves de 37,5% d'ici à 2030, un objectif plus ambitieux que la proposition initiale, immédiatement dénoncé par l'industrie automobile. L'ACEA (association des constructeurs européens d'automobiles) a fait part de ses "graves inquiétudes"...

Voir ci-dessous le communiqué de l'ACEA (en anglais)

Ce compromis politique, qui devra encore recevoir l'assentiment officiel des deux institutions, intervient deux jours après la fin de la COP24 en Pologne, où la communauté internationale a échoué dans sa tentative de s'accorder sur de nouvelles ambitions en matière de lutte contre le changement climatique.

"Nous avons eu des négociations dures et intenses aujourd'hui et nous avons travaillé inlassablement pendant notre présidence pour faire des progrès significatifs (...) Je suis persuadée que les Etats membres vont soutenir cet accord", a déclaré Elisabeth Köstinger, ministre autrichienne du Développement durable, citée dans un communiqué.

Son pays, qui occupe la présidence tournante de l'UE, a mené les négociations au nom des 28. Le compromis trouvé lundi est à mi-chemin entre les positions des Etats membres, plus conservateurs, et celle du Parlement européen. Et il est bien plus strict que ce qui était proposé par la Commission européenne.

Le commissaire européen à l'Action pour le Climat, Miguel Arias Canete, s'est immédiatement félicité de ces "objectifs ambitieux".

"Le succès d'aujourd'hui est d'autant plus important au vu des conclusions de la COP24 de Katowice de ce week-end", a-t-il commenté, cité dans un communiqué. "Cela montre clairement, une fois de plus, notre engagement indéfectible à l'égard de l'Accord de Paris", a-t-il ajouté.

Les négociateurs se sont accordés sur une réduction de 37,5% des émissions de CO2 d'ici à 2030 par rapport à 2021. L'exécutif européen avait proposé -30%, le Parlement demandait -40%.

De leur côté, les 28 avaient accouché au forceps d'une position commune en octobre, à -35%. Un groupe de pays dont l'Allemagne et des pays de l'est ne voulait pas aller au-delà d'une baisse de 30%. La France avait défendu une baisse de 40% avant de se rallier au compromis. Des pays comme le Luxembourg, les Pays-Bas et l'Irlande avaient déploré le manque d'ambition du Conseil.

Le compromis prévoit également un objectif de réduction d'émissions de carbone de 31% pour les camionnettes. Pour celles-ci comme pour les voitures, un objectif intermédiaire de -15% a été fixé pour 2025.

 

Avertissement des constructeurs

L'industrie automobile s'était fortement mobilisée tout au long du parcours législatif du texte, arguant notamment de risques pour l'emploi. L'Association européenne des constructeurs automobiles a, une nouvelle fois, fait part de "graves inquiétudes" lundi.

Les objectifs fixés par l'UE vont avoir un "effet dévastateur" sur l'emploi dans l'industrie automobile, a averti l'ACEA dans un communiqué.

"L'industrie déplore que cet objectif pour 2030 réponde purement à des motivations politiques, sans prendre en compte les réalités technologiques et socio-économiques", explique-t-elle.

L'ONG Transport & Environnement s'est de son côté félicitée malgré quelques réserves.

"L'Europe change de vitesse dans la course à la production de véhicules à émissions nulles. La nouvelle législation signifie que d'ici 2030, environ un tiers des nouveaux véhicules fonctionneront à l'électricité ou à l'hydrogène. C'est un progrès, mais cela ne va pas assez vite pour atteindre nos objectifs climatiques", a nuancé Greg Archer, de T&E.

L'eurodéputée Verts Karima Delli, présidente de la commission Transport au Parlement, s'est montrée plus dure.

"Au lieu de recadrer le secteur automobile et de préconiser des mesures favorisant les investissements et les nouveaux emplois dans une mobilité à zéro émission, les gouvernements ont une nouvelle fois fait preuve de leur impuissance à forger des lois à la hauteur des enjeux climatiques et des attentes des citoyens", a-t-elle regretté.

L'UE s'est engagée à la COP21 à réduire d'au moins 40% les émissions des gaz à effet de serre (CO2, méthane, protoxyde d'azote, etc.) d'ici 2030, par rapport à 1990, dans l'ensemble des secteurs de son économie.

© 2018AFP