Inde : Delhi, capitale la plus polluée au monde

La capitale indienne Delhi, la plus polluée au monde, va mettre en place en janvier une première expérience de circulation alternée, pour tenter d'assainir l'air chargé en particules fines que respirent ses 17 millions d'habitants, particulièrement en hiver.

Ces derniers jours encore, la ville s'est retrouvée noyée dans un brouillard opaque, la couche nuageuse empêchant l'évacuation des gaz toxiques.

Déjà plus de 8,5 millions de véhicules circulent dans les rues et sur les avenues de Delhi, auxquels s'ajoutent 1.400 nouvelles voitures chaque jour. Les seuils de pollution grimpent encore en hiver, lorsque des milliers d'Indiens allument des feux pour se chauffer.

Or à l'inverse de Pékin, autre grande capitale d'Asie souffrant de la pollution, il n'existe à Delhi aucun système d'alere quand le stade de contamination de l'air atteint un niveau dangereux pour la santé.

Alors que plusieurs villes chinoises limitent déjà le nombre de voitures en circulation, la capitale indienne va mettre en place à partir de janvier des mesures de circulation alternée.

Les transports publics vont être renforcés et il a été décidé de fermer une centrale à charbon, a annoncé vendredi un haut responsable de l'administration, le secrétaire général KK Sharma.

"Nous allons mettre en place pour un certain temps, en particulier l'hiver quand la pollution est élevée, la circulation alternée", a-t-il dit à l'issue d'une réunion d'urgence.

"Nous allons nous efforcer de commencer dès le 1er janvier" dans cette mégapole du nord de l'Inde, a-t-il ajouté, expliquant que ces mesures seraient dans un premier temps temporaires.

 

L'Inde, acteur-clé de la COP21

L'annonce de cette mesure coïncide avec la conférence sur le climat de Paris (COP21), où l'Inde, deuxième pays le plus peuplé du monde avec 1,2 milliard d'habitants, est un poids lourd des négociations.

Quatrième pollueur de la planète, avec 6,5% des émissions de gaz à effet de serre, l'Inde a profité de cette tribune pour réaffirmer qu'elle ne pourrait pas se passer des énergies fossiles, en particulier le charbon, pour développer son économie et fournir de l'électricité à ses 300 millions d'habitants qui en sont dépourvus.

Son Premier ministre Narendra Modi a estimé que la communauté internationale devait laisser "de la place pour la croissance des pays en développement" et ne pouvait "imposer la fin" des énergies fossiles.

Une étude menée l'an dernier par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur 1.600 villes du monde a montré que Delhi affiche la plus haute concentration annuelle de particules fines à pm2,5, c'est-à-dire d'un diamètre de 2,5 microns.

Ces particules, qui s'installent profondément dans les poumons et peuvent passer dans le système sanguin, sont responsables de taux plus élevés que la moyenne de bronchites chroniques, cancers du poumon et maladies cardiaques.

Or les gouvernements locaux successifs ont été régulièrement critiqués pour ne pas avoir réussi à abaisser les seuils de pollution de l'air.

La justice a déjà tenté de faire pression sur les autorités en ordonnant plusieurs mesures, dont une taxe supplémentaire pour les dizaines de milliers de camions entrant dans la capitale la nuit - leur circulation y est interdite le jour - mais qui n'est pas encore entrée en vigueur.

Mercredi, le tribunal indien compétent en matière d'environnement avait imposé aux autorités de Delhi de dévoiler une stratégie pour endiguer la pollution.

Les mesures annoncées vendredi ont été saluées par les défenseurs de l'environnement, qui s'interrogent cependant sur leur faisabilité.

"Ce sont des mesures sérieuses nécessaires pour améliorer la qualité de l'air à Delhi, nous sommes dans une situation d'urgence et j'apprécie que le gouvernement de la capitale s'engage", a réagi Sunita Narain, chef du Centre for science and environment (CSE), spécialisé dans les questions d'environnement, sur la chaine NDTV.

"C'est important de dire que ce sont des mesures dures, qui seront difficiles à appliquer, mais que c'est le rôle du gouvernement qui répond à une urgence de santé publique. C'est très bien", a-t-il ajouté.

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