Helsinki veut rendre la voiture superflue en 2050

Conjuguer croissance démographique et développement durable: Helsinki, une des villes les plus vertes d'Europe, a l'ambition de rendre la voiture superflue, sans l'interdire, d'ici à 2050 et de devenir "neutre en carbone".

Les habitants de la capitale de la Finlande apprécient la qualité de vie dans cette ville à taille humaine, où vivent un peu plus de 600.000 personnes et qui en attire de plus en plus.

Mais, si elle veut garder sa bonne réputation alors qu'elle anticipe une croissance de la population de 40% en 35 ans, Helsinki doit trouver des solutions ambitieuses.

Afin de préserver la pureté de l'air et les espaces verts - qui occupent 47% de sa superficie -, les élus ont conçu un plan qui prévoit une circulation réduite, donc moins d'émissions de CO2, et des quartiers vivables à pied.

Les familles devront pouvoir se passer de voiture en ayant magasins, écoles et autres services à proximité, et les salariés privilégier trains, métros et tramways pour se rendre à leur travail.

Le directeur municipal de l'urbanisme, Rikhard Manninen, parle de "boulevardisation" pour qualifier la transformation d'artères grises et embouteillées en avenues vertes, offrant aux riverains des commerces sur place plutôt que la tentation de descendre vers le centre-ville.

Pour éviter l'engorgement, il n'est pas ici question, comme dans d'autres grandes villes d'Europe, de mesures coercitives: ni péage, ni circulation alternée. Il s'agira plutôt de permettre de vivre sans voiture.

"On va garder les espaces verts en canalisant la plupart des projets de construction dans les zones où il y a actuellement des autoroutes ou voies rapides", expose M. Manninen à l'AFP.

 

Ville 'neutre en carbone'

La ville ambitionne de devenir "neutre en carbone", à savoir qu'elle rejetterait autant de CO2 qu'en absorbent ses arbres.

"Helsinki a déjà réussi à faire considérablement baisser ses émissions (...) mais pour être neutre en carbone en 2050 il va falloir passer à la vitesse supérieure", selon l'un des urbanistes municipaux, Alpo Tani.

La circulation est un champ d'action prioritaire car elle génère 20% du CO2 et, si rien n'est fait, 30% en 2050. Il ne s'agit pas seulement de rendre les transports en commun plus pratiques et attrayants, mais aussi de réduire la nécessité des déplacements, en permettant à chacun d'avoir à portée de main commerces et services.

Même dans une ville dont le centre est situé sur une péninsule qui risquerait l'asphyxie si la voiture l'emportait, les mesures qui doivent entraver l'usage de la voiture ne sont pas au goût de tous.

"C'est une très mauvaise idée. Je n'ai rien contre les transports en commun mais rien ne vaut ma voiture", s'insurge Johan, 50 ans, au volant. Les 20 minutes de conduite entre Helsinki et la ville limitrophe d'Espoo, où il a déménagé pour avoir un peu plus d'espace, lui conviennent.

La Chambre de commerce juge le projet "démesuré" et voué à l'échec. "Le but qui consiste à diriger toute la croissance du trafic vers des moyens autres que l'automobile est irréaliste au moment où la ville s'étend", dit le président de son comité transports, Heikki Kovanen.

 

Premiers gratte-ciel

D'autres habitants se réjouissent de la perspective d'un meilleur réseau, à commencer par l'extension du métro vers l'ouest jusqu'à Espoo, en service en 2016.

"Le projet a l'air bon et pragmatique. Les transports en commun déplacent plus de gens que les véhicules particuliers", selon un retraité d'Espoo, Matti, marchant dans Helsinki. Son frère Mikko est favorable à des restrictions sévères contre l'automobile, comme "des péages pour que tout le monde ne s'entasse pas sur cette péninsule avec sa voiture".

L'autre débat, c'est la hauteur des constructions. Helsinki a des habitants traditionnellement hostiles aux projets de tours, qu'elles soient de bureaux ou d'habitations.

La municipalité assure qu'elle ne bouleversera pas l'harmonie du paysage. "Construire en hauteur sera permis à certains endroits, mais pas dans le centre", souligne M. Manninen.

C'est le cas de Kalasatama (le "Port aux poissons"), quartier du front de mer en pleine reconversion, où sont aujourd'hui posées les fondations des premiers gratte-ciel finlandais.

Le quartier doit être un exemple de l'attrait des abords maritimes d'Helsinki, rendus aux piétons et aux loisirs, et du dynamisme de la capitale, en accueillant 20.000 habitants et 8.000 emplois en 2030.

© 2015AFP